En 1762, le quinquagénaire Rousseau, brouillé avec ses anciens amis Madame d'Epinay et les philosophes, s'est retiré en région parisienne à Montmorency chez le maréchal de Luxembourg, retraite que les philosophes dénoncent comme l'attitude du méchant. Ainsi Rousseau se justifie-t-il dans quatre lettres adressées à M. de Malesherbes, directeur de librairie, homme éclairé et ami des philosophes. Dans la 3ème et dernière lettre datant de janvier 1762, Rousseau qui est malade peint a posteriori un tableau idyllique de l'Hermitage, dressant une apologie de sa personnalité et de sa situation, en exaltant un bonheur à la fois sensible et spirituel.
[...] Dans la 3e et dernière lettre datant de janvier 1762, Rousseau qui est malade peint a posteriori un tableau idyllique de l'Hermitage, dressant par là une apologie de sa personnalité et de sa situation, en exaltant un bonheur à la fois sensible et spirituel. Quelle stratégie adopte Rousseau pour défendre sa conception du bonheur ? Nous répondrons en étudiant la composition d'une page plus affective et poétique que logique, puis la réponse aux attaques et le passage à l'argumentation et enfin, les accents préromantiques de cet extrait. I. [...]
[...] Il répond aux attaques dont il a été l'objet Destinataire : Monsieur Monsieur de Malesherbes et les philosophes (surtout Voltaire et Diderot) Paradoxe : dans sa réponse, Rousseau n'emploie pas le terme bonheur alors que c'est le sujet de sa thèse. Parasynonymes : plaisirs si délicieux beaux jours doux souvenirs volupté ravissement étourdissante extase (l45-46). Ils scandent le texte en allant crescendo d'un terme à l'autre, du plus superficiel au plus spirituel. Le texte se termine donc en apothéose avec étourdissante extase Expérience : Pour un philosophe, être seul signifie être malheureux. Rousseau se sert de sa propre expérience pour imaginer un siècle d'or à sa fantaisie B. [...]
[...] Conséquences : livrait sans retenue (l.45), ivresse du bonheur. Beaucoup de larme : il exprime cette ivresse grâce à des larmes de joie viriles . Vrai plaisir : Cette expression du bonheur utilise uniquement des mots simples. Sensibilité morale : Les si (l.13) ponctuent ce bonheur de sensiblerie. Il confond alors sensibilité et vertu : c'est une sensibilisation morale. Transition : Dans cette page à caractère autobiographique, où le pacte autobiographie est rempli, Rousseau démontre qu'un homme qui goûte ce bonheur-là ne saurait être le méchant que l'on dit. [...]
[...] Par ailleurs, ce texte annonce partiellement le romantisme avec l'expression le vague des passions la morbidité suicidaire cependant en moins, avec le thème de la communion entre homme et la nature et enfin avec ses accents mystiques même s'il n'appartient pas au panthéisme. Cette page lyrique que définit un bonheur propre à Rousseau participe comme les trois autres Lettres à M. de Malesherbes (1762), Les Confessions (1767) et Les Rêveries du promeneur solitaire (1778 - 1782) à cette apologie dramatique de soi que Rousseau poursuivra pour se faire connaître de ses compatriotes non comme un méchant, mais comme un être bon en parfaite cohérence avec la vie, pure avec la nature, mais dépravé au contact de la société. [...]
[...] Transition : Ces lettres réellement écrites sont d'un genre proche de l'autobiographie, car elles développent la vie intérieure très riche de Rousseau dans les trois étapes : Rousseau est très descriptif et analytique de lui-même (Montaigne a dit Qui se connaît, connaît aussi les autres, car chaque homme porte la forme entière de l'humaine condition B. Composition poétique et lyrique avec des crescendo et des decrescendo Amplitude des phrases : Le premier mouvement voit ses phrases s'allonger en allant crescendo Le rythme : majoritaire binaire avec des effets ternaires Reprise : dont qui Envolée lyrique : l14 - l19 avec interjection élégiaque Oh et deux points d'exclamation dans la même phrase ce qui montre une gradation croissante du ton. [...]
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