Surveiller et punir, Michel Foucault, champ lexical, syntaxe, lexicologie, prison, ordonnancement des mots, habitus, humanisation
Philosophe français influent de la seconde moitié du XXe siècle, Michel Foucault écrit en 1975 son étude systématique de l'institution carcérale, Surveiller et punir. Issu d'un engagement militant pour la condition des détenus, « plus de quarante ans après sa publication, il demeure l'un des ouvrages les plus cités en sciences sociales et n'a rien perdu de sa force et de sa pertinence en tant qu'outil d'analyse des rapports de pouvoirs qui traversent la société dans son ensemble et la prison en particulier ». Le présent extrait est issu de Surveiller et punir, en quelques lignes, Foucault décrit de quelle façon la torture a disparu : c'est la « disparition des supplices », phénomène qui n'a pas fait l'objet d'analyses particulières selon Foucault. Pourtant, ce processus est tout à fait important dans l'histoire de l'institution carcérale sur le long cours ; Foucault dresse ici, tant stylistiquement que sur le fond, le portrait d'une évolution importante dans l'histoire de l'humanité qui semble avoir été passée sous silence par la majorité des chercheurs en sciences sociales.
Dans quelle mesure l'ordonnancement des mots dans le présent extrait permet-il de mettre en exergue un message ayant une telle portée dans l'histoire du sujet développé par Foucault (les prisons) et plus largement, dans les habitus de l'humanité elle-même ?
[...] « souffrir » (l. « douleurs » (l. 10). Puis la saccade en fin de texte ramassé en trois lignes : « supplicié », « dépecé », « amputé », « marqué » (l. 13) ; « mort », « cible » (l. « répression » (l. 15). Le champ lexical est axé sur la représentation du corps et l'ordre des mots l'amène précisément vers ce terme jusqu'à la toute fin du corps lui-même : « mort » (l. [...]
[...] Modification partage la même racine que « modulation » ; il s'agit de mettre en exergue un changement paramétrique dans la configuration des objets, d'induire un processus (par son suffixe, notamment) et de suggérer non pas un changement de nature, mais un changement de condition ou de degré. Foucault note immédiatement à cet égard que, du fait que de ce changement qui semble a priori paramétrique, « on est aujourd'hui un peu porté à le négliger » (l. bien que son importance soit tout à fait considérable dans l'étude de l'institution répressive en France selon l'auteur. « Et de toute façon », argue l'auteur, « quelle est son importance, si on la compare aux grandes transformations institutionnelles » ? (l. 5-6). Ici, après « modifications » (l. [...]
[...] L'humanisation peut poser plusieurs problèmes dans le contexte de l'analyse foucaldienne des supplices corporelles. Peut-on vraiment transformer un objet en homme ? Un objet en sujet humain ? Si oui, cela signifie-t-il que la gestion de cette transformation peut s'effectuer par des institutions comme celles qui ont en charge la répression pénale dans l'Etat contemporain ? Foucault rappelle que cette invisibilisation du fait de la disparition des supplices corporels est peut-être amputable au fait qu'on l'aurait « mise trop facilement et avec trop d'emphase au compte d'une `humanisation' qui autorisait à ne pas l'analyser » (l. [...]
[...] Le thème est prescrit dès la première phrase par le renvoi à cette expression, ce phénomène relevé par la préséance de l'ordre des deux points présentatifs. Aussi « il s'agit alors d'étudier la possibilité d'ordonner les phénomènes en mettant en place un balisage des études afin de dégager d'éventuelles régularités de fonctionnement ». Le champ lexical des supplices corporels est dense dans l'extrait, et exhaustivement présenté comme tel : « correctif » (l. « peine » (l. « châtiments » (l. [...]
[...] 13) la disparition des supplices corporels visibles pour les remplacer par des phénomènes invisibles au quidam mais d'autant plus présents dans toutes les sphères de cette même répression, n'est finalement pas quelque chose de vraisemblable aux yeux de Foucault, car à ses yeux la prison « ne sert qu'à une chose, créer de la délinquance qui, en retour, permet un contrôle de plus en plus profond des populations ». La prison est donc l'expression du pouvoir et de la domination : analyse foucaldienne qui prolonge le raisonnement sur l'idéologisation du politique et la supposée « humanisation » de ses doctrines au service d'un renforcement du pouvoir étatique sur les corps et les « âmes » de la population dont il s'est attribué la charge. [...]
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