Le langage humain est un phénomène profondément lié à l'évolution corporelle des hominidés. Quoi qu'il s'agisse d'une manifestation éminemment sociale, il est irréductiblement, en tant que tel, une manifestation du comportement individuel qui met en jeu le corps et la maîtrise d'un nombre important de contrôles psychomoteurs.
Or, le langage humain ne semble pourtant pas irréductiblement lié à la spécificité du canal audio-oral. Le phénomène le plus étonnant est, en effet, l'existence de supports transposés. On entend par support transposé tout remplacement du support audio-oral au profit d'un autre, tandis que demeure l'identité du langage. On connaît des supports transposés qui utilisent le corps humain (par exemple, la transposition d'un langage donné en un langage par gestes), et qui, même, peuvent conserver matériellement un support audio-oral (transposition en langage sifflé). Le point essentiel est la possibilité de transpositions qui n'utilisent plus le corps humain, comme le langage tambouriné, les signaux de fumée ou ceux des sémaphores.
[...] Le point essentiel est la possibilité de transpositions qui n'utilisent plus le corps humain, comme le langage tambouriné, les signaux de fumée ou ceux des sémaphores. Le monde moderne a connu la multiplication des supports transposés, dans le but de communiquer à distance : analogiques comme les variations d'intensité électrique utilisées dans les premiers téléphones et celles des ondes radio ou digitaux comme le morse (qui est en fait un codage de l'écriture) et, plus généralement aujourd'hui, les techniques de numérisation du son qui débordent largement le langage. [...]
[...] Mais elle présente l'idée essentielle qui revient à n'admettre pour écriture que ce qui est une représentation, un support transposé, d'un langage naturel. Nous réserverons au reste le nom de graphisme. Le graphisme a toujours préexisté à l'écriture stricto sensu et l'écriture elle-même n'est qu'une spécification du graphisme. Mais si, par exemple, la représentation stylisée (et donc codifiée) d'une scène de la vie quotidienne peut donner lieu à une paraphrase verbale et donc, d'une certaine façon, se lire elle n'est pas encore de l'écriture. [...]
[...] Le second problème concerne l'extension même du concept d'écriture. Contrairement à ce que suggère l'étymologie, la pictographie n'est pas une écriture, c'est simplement une peinture de choses. Il est difficile de se passer de la pictographie si l'on veut expliciter la nature et la naissance des systèmes d'écriture. Gelb, qui critique à juste titre la confusion qu'elle entraîne entre des systèmes d'images et la forme externe de certains systèmes d'ccriture, l'a prise en compte, dans sa théorie de l'écriture, pour laquelle il a proposé en 1952 le nom de grammatologie. [...]
[...] L'écriture Qu'est-ce que l'écriture ? Le langage humain est un phénomène profondément lié à l'évolution corporelle des hominidés. Quoi qu'il s'agisse d'une manifestation éminemment sociale, il est irréductiblement, en tant que tel, une manifestation du comportement individuel qui met enjeu le corps et la maîtrise d'un nombre important de contrôles psychomoteurs. Or, le langage humain ne semble pourtant pas irréductiblement lié à la spécificité du canal audio-oral. Le phénomène le plus étonnant est, en effet, l'existence de supports transposés. On entend par support transposé tout remplacement du support audio-oral au profit d'un autre, tandis que demeure l'identité du langage. [...]
[...] Les questions par lesquelles le phénomène de l'écriture appartient à la philosophie du langage sont multiples : à quels problèmes humains répond la création de l'écriture ? quels sont les rapports entre la parole humaine (l'oral) et l'écrit ? quelles nouvelles possibilités intellectuelles ouvre-t-elle à l'humanité ? doit-on admettre que la naissance de l'écriture est le premier aboutissement des sciences du langage ? quelle est la valeur de la définition d'Aristote ? peut- on inverser ontologiquement le rapport chronologique entre l'oral et l'écrit qu'elle propose, pour faire de ce dernier la condition de possibilité même de tout langage (thèse derridienne de l'archi-écri- ture) ? [...]
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