Dans "La fabrique de la langue", Lise Gauvin retrace les différentes étapes dans l'évolution de la langue française, depuis sa naissance jusqu'aux auteurs contemporains, en passant par tous les grands courants littéraires qui se sont succédé. Elle trace un parallèle entre le langage et la littérature et leur perception par les grands auteurs au cours des siècles et insiste bien sur les grands moments de la littérature française, notamment les étapes qui ont conduit à des ruptures et donc des nouveautés.
Après avoir dressé un rapide aperçu des premières œuvres littéraires françaises, qui seraient "Les serments de Strasbourg" et la "Séquence de sainte Eulalie", Lise Gauvin nous expose les différentes étapes de la naissance et du développement du français en tant que langue officielle et s'appuie sur la "Deffence et illustration de la langue francoyse", écrite par Du Bellay au nom des membres de la Pléiade pour annoncer les enjeux polémiques, poétiques et politiques de cette langue, pour nous montrer quels ont été, très tôt, les enjeux et les débats suscités par cette langue.
[...] Il désire exprimer par tous les moyens dont il dispose le non-dit et pour cela a énormément recours aux germanismes, anglicanismes, néologismes, mots d'usage récent, il mélange tout jusqu'à trouver l'expression de ses sentiments, de ce qui n'est pas exprimable avec les mots courants dans ses textes. L'oralité est stylisée et recrée dans Une saison en enfer, avec la superposition de plusieurs niveaux de langue en particulier. Enfin, Mallarmé voit la poésie comme le seul moyen de corriger les défauts de la langue, il s'appuie pour affirmer cela sur sa théorie des langues imparfaites. Le poète doit laisser toute la place aux mots en laissant de côté son individualité, afin de donner sa propre autonomie au langage. [...]
[...] George Sand eut elle aussi un impact dans la pensée romantique. Elle manifeste un certain intérêt pour les paysans dans son oeuvre et utilise du vocabulaire et des tournures qui leur sont propres en faisant d'eux des narrateurs, d'où la présence du dialecte berrichon (cf François le champi). Cependant, pour rendre l'expression intelligible à un plus large public, elle accompagne le mot patoisant de son synonyme ou elle l'enchâsse dans une périphrase explicative. Elle recherche avant tout la simplicité, reproduire les mots entendus est une constituante essentielle. [...]
[...] Cette étrangeté de la langue est partagée par les écrivains belges et québécois. En effet, Gaston Miron, auteur québécois, est représentatif d'un mouvement qui prend conscience de l'état de domination et de demi-colonialisme de la société québécoise et qui perçoit la dégradation de leur langue comme résultant de cette situation ; la langue est alors vue comme cicatrice, d'où une utilisation volontaire d'une langue humiliée parlée par les classes laborieuses. Sa poésie est vue comme proche de la protestation pour dénoncer une situation oppressive. [...]
[...] Enfin, l'auteur a conscience de l'éphémère du texte une langue, c'est comme le reste. Ça meurt tout le temps. Ça doit mourir Queneau va également être n tournant dans la littérature par son style très personnel et inattendu. Influencé par Céline et surtout Rabelais et l'idée de différence entre langue parlée et langue écrite, il veut donner au français tel qu'il est parlé une existence littéraire, ce qui pour lui appelle à un renouvellement de la langue, accompagné par un renouveau des idées néo-français Il souligne l'illogisme de l'orthographe et tente de restituer le rythme et la syntaxe de la langue parlée, ainsi que son vocabulaire et ses sonorités, en ayant recours à des formes fantaisistes de transcriptions phonétiques. [...]
[...] Depuis eux, de nombreux auteurs privilégient l'acte même de parler dans leurs écrits, la volonté d'oralité de l'écriture qui montre la prise de distance avec certaines conventions narratives, mais aussi sociales (tous les sujets sont abordés, même ceux considérés comme tabous). Pour clore son ouvrage, Lise Gauvin se penche sur les littératures francophones, qui mêlent l'utilisation du français, mais lié à des cultures propres selon les auteurs. Ces littératures sont relativement récentes et constituent une réelle réflexion sur la langue et l'articulation langue/littérature. On les qualifie parfois de littératures de l'intranquilité qui s'interrogent sur la nature même du fait littéraire. [...]
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