Chaque langue possède son propre répertoire de phonèmes qui varie évidemment d'une langue à l'autre : ainsi le th anglais, le ch allemand ou le j espagnol n'existent pas en français. En d'autres termes, l'effet de la syllabe n'est pas universel et répond à certaines exigences. En effet, Dupoux (1992) a montré que les espagnols adoptaient la stratégie d'un découpage syllabique que lorsque leur temps de réactions était supérieur à la condition normale. De plus, la transparence dans les langues diminuant les probabilités d'avoir un effet de la syllabe, ainsi que l'instabilité inhérente à la syllabe peuvent contrarier certaines interprétations. Mehler a envisagé une segmentation syllabique précoce dans le traitement de l'information acoustique. Pour ce dernier, lorsque la structure de la première syllabe du mot ne correspond pas à la cible, l'individu comble cette incongruité en activant une lettre supplémentaire de ce mot (tâche incongruente : une cible CVC et un mot structuré en CV.CV), voire supprime la dernière lettre de la première syllabe du mot afin qu'elle corresponde à la cible (tâche incongruente : une cible CV et un mot structuré en CVC.CV). Ceci aurait pour conséquence, une augmentation des temps de réponse des sujets dans les tâches congruentes. Autrement dit, selon cette hypothèse, l'effet de la syllabe devrait pouvoir être observé quelle que soit la syllabe. Quant à Rietveld et Frauenfelder (1987), le traitement du signal acoustique ne serait pas uniquement attribué à la syllabe mais plutôt à sa diversification, en tenant compte d'unités allo phoniques et subphonétiques. Dans ce cas, l'effet devrait varier selon le type de syllabe employée.
L'objectif de cette recherche était donc de répliquer les effets syllabiques de Mehler au travers une étude basée sur des pseudo-mots.
[...] Les tentatives de Content and al de reproduire le phénomène avec des pseudo mots se sont soldées par des échecs. Les résultats obtenus montrent qu'une partie de l'effet s'explique par les propriétés temporelles des syllabes en production sans requérir la notion de codage mental syllabique. Par ailleurs, ils suggèrent que l'effet syllabique ne serait apparent que pour des consonnes pivotales liquides, ce qui nous a amenés à penser qu'il reflète la présence de dissemblances fines entre les cibles et leurs réalisations phonétiques dans les porteurs qui rendraient la détection plus ardue. [...]
[...] C'est à travers ce protocole expérimental, que Mehler a pu observer que les temps de réponses des sujets étaient plus courts lorsque la cible à détecter correspondait à la première syllabe du mot. De ce fait, il a orienté sa thèse en faveur d'un découpage syllabique plutôt que phonémique dans la reconnaissance des mots parlés. Toutefois, cette reconnaissance acoustique se ferait selon la langue. En effet, dans une étude ultérieure, Cutler et al. (1983, 1986) ont comparé les résultats de l'expérience initiale à ceux d'anglophones testés avec le même matériel expérimental (français), et à des locuteurs français et anglais qui recevaient des stimuli analogues en anglais. [...]
[...] Enfin, la réinterprétation de l'effet syllabique proposée ne signifie pas que la structure syllabique n'ait aucun rôle à jouer dans la perception de la parole. Au contraire, ces mêmes auteurs ont avancé dans d'autres publications (Content and al) l'hypothèse que la perception des attaques de syllabes pourrait servir d'ancrage aux processus d'accès lexical dans la parole continue. [...]
[...] Les participants étaient des étudiants de premier cycle à l'Université de Genève. Ils étaient tous de langue maternelle française et aucun ne présentait de trouble de l'audition ou du langage. Dans la première expérience, tous les stimuli étaient mélangés, et les auteurs ont examiné l'effet de la présence “d'essais pièges” dans lesquels le stimulus commence par les mêmes phonèmes que la cible, mais comporte une différence ensuite. On sait en effet que la présence de tels pièges ralentit la détection, et certains travaux suggèrent que l'effet syllabique apparaît plus nettement lorsque la détection est ralentie (Dupoux, 1990). [...]
[...] Sequence detection in pseudowords in French: Where is the syllable effect? Cadre théorique et problématique de l'étude Il y a une vingtaine d'années, Mehler, Dommergues, Frauenfelder & Segui (1981) ont utilisé une tâche de détection de cibles monosyllabiques (pa ou pal) dans des mots porteurs dissyllabiques (pa.lace ou pal.mier) afin de démontrer le rôle de la syllabe dans la reconnaissance du flux oral. Ils ont mis en évidence un effet syllabique caractérisé par une facilitation de la détection lorsque la cible correspond exactement à la première syllabe du porteur (pa dans pa.lace ou pal dans pal.mier) par rapport aux cas où elle correspond à un peu plus (pal dans pa.lace) ou à un peu moins (pa dans pal.mier) que cette syllabe. [...]
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