La fameuse dispute entre Cratyle et Hermogène représente un sujet de réflexion et tout un programme de recherches. D'ailleurs, elle a été très souvent discutée et commentée au cours de l'histoire de la pensée philosophique et linguistique. Elle représente en effet le point de départ de la réflexion sur la nature du signe linguistique et de la langue en général. Mais ces discussions et ces réflexions avaient lieu au sein de la philosophie plutôt qu'au sein de la grammaire ou la linguistique. Bien que la discussion porte sur la nature du mot en général, nous l'avons mise en exergue du chapitre sur le nom propre, tout d'abord parce que ces deux aspects se confondent d'une certaine manière et puis parce que le nom propre (nom de serviteurs) y est mentionné expressis verbis par Hermogène. La réplique de Socrate, elle aussi contient des éléments qui puissent nous suggérer qu'il ne pense pas exclusivement aux noms communs. Car c'est à l'opposition des noms communs et des noms propres que nous faisons allusion dans la formulation de notre titre, et tout particulièrement aux problèmes que pose l'étude du nom propre, étant donné que toutes les préoccupations de la sémantique et de la linguistique en général se réduisent pratiquement aux problèmes des noms communs.
Nous voulons examiner la validité et la portée des deux thèses opposées, aussi bien que le bien-fondé de l'affirmation de Socrate que “l'intuition de noms n'est pas une petite affaire”. Il faut dire dès le départ que la linguistique n'a pas beaucoup avancé dans l'étude des noms propres. Pendant longtemps, aujourd'hui encore, cette matière a été laissée à l'onomastique, une discipline qui est loin d'être une chasse gardée de la linguistique, bien que ce soient les linguistes qui s'en occupaient en majorité, mais les résultats servaient plutôt aux autres sciences (histoire, géographie) qu'à la linguistique.
[...] Certains travaux d'inspiration générativiste ont d'ailleurs buté sur ce point : Que faire des noms propres précédés d'un déterminant? Je me contenterai de souligner la conséquence de cette histoire trop rapidement (voquée: pendant longtemps, il n'y avait aucune raison que le nom propre soit choisi comme objet d'une étude linguistique. C'est sous la double influence de la logique et de la théorie de l'énonciation que les choses ont (volué. Contrairement aux linguistes, les logiciens se sont depuis longtemps intéressés au nom propre, qui se trouve au coeur des problématiques de l'individu et de l'identité.” (Gary-Prieur, o.c, p. [...]
[...] Le NP ne signifie pas, il d(signe purement et simplement, c'est un d(signateur. Cela ne veut pas dire que le NP ne v(hicule aucune information qui est en effet que l'interlocuteur sait d(jà du r(f(rent”. S'il n'en sait rien, le NP lui dit ou lui signifie rien” (To mi ime ništa ne znači.) La thèse de Mill donne la priorit( à la d(signation; souligne l'absence de connotation; et renvoie à la connaissance du r(f(rent. Et la connaissance du r(f(rent signifie la connaissance encyclop(dique, la connaissance du monde, de la r(alit(, de l'univers. [...]
[...] ) Les noms propres ( . ) ne sont pas intégrés dans le réseau sémantique. Par rapport aux autres unités lexicales, noms communs en particulier, ils occupent une place sp(cifique et marginale dans la structure sémantique d'une langue donnée. (Problèmes de référence: descriptions définies et noms propres, Paris, Klincksieck p. 404- 405, cité d'après Gary-Prieur, o.c.,p.3) Et Gary-Prieur d'expliquer pourquoi: "Sur le plan s(mantique, le nom propre dévie doublement du modèle saussurien du signe : d'une part, son signifié ne correspond pas à un concept, ou “image mentale” stable dans la langue et d'autre part, on ne peut pas définir la valeur dans un système de signes. [...]
[...] Alors que les noms de villes, de villages, de rues et de familles ob(issent aux règles d(jà bien (tablies et pr(sentent un fonds solide pour tout acte de nomination, il y a des domaines aujourd'hui très dynamiques où l'acte de nomination n'a pas de fonds ni de règles pr((tablies. Il s'agit des noms de produits (industriels, alimentaires, pharmaceutiques, etc.), des magasins et des soci(t(s, des boutiques et des caf(s-bars, si bien que l'acte de nomination est devenu aujourd'hui, vu le rythme de la production industrielle et du d(veloppement comercial, un fait quotidien dont s'occupent les amateurs et les professionnels. [...]
[...] FR renvoie à la personne ou l'objet désigné “rigidement” au moment du “baptême”, conformément à l'affirmation qui dit: peut avoir une référence, mais non pas de sens.” C'est-à-dire que “l'arrière-plan descriptif relie le NP aux caractéristiques des objets auxquels il réfère.” (Lyon) L'utilisation prédicative des NP est une assertion équative ou existentielle: Amsterdam est la Venise du nord. ou Molière, c'est Jean Baptiste Poquelin. (Cf. aussi: J.L. Austin, Pilosophical Papers, Oxford University Press, 1961; (trad. fr. Quand dire, c'est faire, Seuil, 1972); J.R. Searle, Proper names, Mind 166-171; Speech Acts, Cambridge University Press, 1969). [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture