Marina Yaguello tend à nous livrer une analyse sociolinguistique de notre langue en montrant que ce n'est pas un tout unifié, mais qu'elle se compose de beaucoup de variantes qui relèvent principalement de l'ordre social. Il est donc important de situer de quoi nous traitons ici, c'est-à-dire la langue. En effet, c'est un système symbolique ancré dans une société et dans les rapports sociaux. Cette définition nous amène donc à mettre de côté l'aspect neutre de la langue au profit de ces conflits sémantiques qu'elle entraîne.
Aujourd'hui, il est indéniable que le rapport entre l'individu et la société passe par la langue et donc par les significations et les représentations qu'elles amènent (...)
[...] De plus, dans cet ordre d'idée, il convient de préciser qu'être mère apparaît comme une normalité : mais une femme qui décide de ne pas avoir d'enfant doit-elle pour autant se voir attribuer une non-féminité ? Le conflit d'Elisabeth Badinter est un ouvrage qui aborde cette question et qui donne lieu à une très grande polémique. En effet, il argumente le constat suivant : la natalité tend à diminuer dans de nombreux pays et les femmes sont unies à la notion de maternité par le biais du dictat de l'allaitement et de l'instinct maternel. [...]
[...] On ne peut faire la liste complète de toutes les expressions qui fonctionnent suivant ce principe péjoratif/positif, ou du moins suivant des connotations différentes : une femme galante est une femme de mauvaise vie, un homme galant est un homme bien élevé une honnête femme est une femme vertueuse, un honnête homme est un homme cultivé une femme savante est ridicule, un homme savant est respecté On peut la faire une allusion à l'œuvre de Molière Les précieuses ridicules. D'ailleurs certaines expressions négatives désignant les femmes n'existent pas au masculin (femme facile), tandis que des expressions élogieuses pour les hommes restent sans féminin. [...]
[...] Cela étant, on aime les petites femmes, mais on admire les grands hommes. Les petits hommes n'existent que chez Gulliver et les grandes femmes ont du mal à s'habiller en confection Un survol de ces dissymétries révèle toute une palette de nuances. Justement, la variété n'est pas la même selon le sexe, et si une femme peut être jolie, belle, mignonne, ravissante, laide ou moche, un homme n'est que beau ou laid Mais pire que femme, d'après Marina Yaguello, il y a le terme de fille d'une connotation terriblement plus négative que garçon. [...]
[...] On peut donc se demander si la langue est sexiste et s'il on peut y porter remède ? Suffit-il d'éradiquer les termes sexistes pour supprimer les mentalités ancrées dans notre société? Et, pour quelles raisons pouvons- nous assimiler notre langue à la langue du mépris ? Nous étudierons donc dans une première partie le fait que le féminin paraît trop singulier frontalement à une prédominance masculine dans notre langue française. Puis, nous aborderons la question de la représentation sociale faisant un parallèle avec une idéologie dite sexiste I Un féminin trop singulier, une prédominance masculine Péjoration du féminin De nos jours, féminin et masculin sont des termes qui renvoient à des classes sociales construites sur un rapport de pouvoir qui se dessine sous les traits du langage. [...]
[...] Marina Yaguello pointe un curieux hasard, qui fait que les adjectifs qui désignent les sexes et les âges de la vie ont des connotations péjoratives : sénile, puéril, infantile, féminin, femelle ; seuls mâle, masculin, viril, sont positifs Les dissymétries se nichent dans tous les champs lexicaux, mais pas toujours au hasard. Ainsi paternalisme n'a pas de féminin, tandis que maternage n'a pas de masculin. Rien d'étonnant puisque les mots en -isme correspondent à des catégories de pensée, donc sont plus prestigieux que les mots en -age qui désignent des actions. [...]
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