L'étymologie est devenue une pratique scientifique, à partir du moment où elle a pu prendre appui sur les lois phonétiques. La découverte des lois phonétiques s'est faite progressivement. On prend conscience que la ressemblance phonétique ne signifie pas grand-chose. Sur la base des ressemblances, eau ressemble peu à aqua, l'allemand feuer et le français feu n'ont rien à voir, de même l'anglais bad et le persan bad.
Jusqu'à la Renaissance, l'étymologie reposait cependant essentiellement sur ce critère naïf qui cependant limitait l'arbitraire des évolutions : On mettait en relation amor avec Roma : on autorisait des troncations et des permutations qui apparaissent aujourd'hui comme farfelues. À partir de la Renaissance, la comparaison des langues romanes (français, italien, espagnol, portugais, occitan) prend de l'ampleur. On croît de manière générale en une origine latine commune à toutes ces langues.
Devant l'ampleur du changement phonétique, toutes les évolutions sont jugées possibles. L'étymologiste le plus célèbre du XVIIe, Ménage fait appel à la notion de corruption des lettres pour expliquer les changements. Les causes de la corruption sont le changement, l'addition, le retranchement et la transposition (permutation). L'étymologie rentre alors dans une crise qui sera résolue par la découverte des lois phonétiques.
L'étymologie moderne et la phonétique historique ne sont possibles que si l'on comprend que les changements de cette importance ont lieu de manière inconsciente chez les locuteurs. Les transformations délibérées sont l'exception. Lorsqu'il y a changement phonétique, on ne s'en aperçoit que rétrospectivement Il en va ainsi au XXe siècle de la disparition progressive du son « un » : la différence entre brin et brun, que font encore des hommes politiques tels que François Mitterand.
La régularité d'un changement phonétique permet d'exclure désormais des hypothèses non conformes à ce que l'on sait de l'histoire phonétique d'une langue. Le changement phonétique est soumis à des lois qui ne sont toutefois pas des lois physiques. Il ne s'agit pas de lois universelles, mais de lois propres à l'histoire de chaque langue que la phonétique historique met à jour.
[...] Les sèmes sont des unités distinctives et font partie des conditions nécessaires et suffisantes (CNS). Cette sémantique aristotélicienne ne prend pas en compte les éléments de sens non distinctifs qui peuvent toutefois éclairer le changement sémantique. La séparation entre savoir sémantique et savoir encyclopédique réduit le sens d'un lexème à ce qui est purement distinctif et ne permet pas toujours d'expliquer le sens figuré Ex : grue : prostituée La sémantique cognitive Dans les dernières années, dans le domaine anglo-saxon, on trouve de nombreux travaux relevant de la sémantique cognitive dont certains traitent de sémantique historique : (ex : Geeraerts, Traugott, Sweetser). [...]
[...] La reconstruction ne peut être isolée. Toutefois, la reconstruction a ses limites : - le degré de précision de la langue reconstituée. Le mot indo-européen est le mot le plus ancien auquel on peut aboutir. L'indo-européen reconstitué n'est certainement pas un ensemble homogène, mais l'ensemble des étymons les plus anciens ayant pu être reconstitués. Au XIXe siècle, August Schleicher avait rédigé une fable en indo-européen, tentative qui apparaît rétrospectivement un peu vaine. - D'autre part, certaines racines sont présentes dans quasiment toutes les langues indo-européennes (chiffres et nombres, termes de parenté), d'autres dans deux ou trois familles de l'indo-européen. [...]
[...] Comme on l'a vu, les 1res recherches étymologiques tentaient naïvement de reconstruire les formes originelles du langage. Le cadre théorique était celui des théories de l'iconicité (lien entre langage et réalité). Cependant, les étymologistes d'autrefois essayaient de se porter au-delà des apparences pour reconstituer des significations disparues. Toutefois, l'objectif était la reconstitution des formes originelles du langage, l'origine absolue des mots. Par ailleurs, les relations formelles étaient le plus souvent fantaisistes et erronées. De plus, les étymologistes ne mesuraient pas la distance qui séparait les langues des premières formes de langage. [...]
[...] Elle exclut les emprunts du champ d'observation (mais il n'est pas toujours facile de savoir si tel mot présent dans plusieurs langues est le résultat d'un emprunt ou non). Elle se fonde sur les lois phonétiques : on ne peut établir d'hypothèses sans connaître les lois phonétiques de chaque langue descendant de l'indo- européen. Comme on l'a vu, les lois phonétiques divergent selon les langues : En latin, conservation du k indo-européen, en germanique, passage du son k au son h : Centum ( hundert, hundred, Canis hund, zehn ( decem. [...]
[...] Inversement, si un seul fait contredit une étymologie, on peut la rejeter. L'étymologie s'appuie sur un grand nombre de disciplines, en particulier l'histoire des peuples et des techniques, la géographie, la phonétique et la sémantique historique, lesquelles ne portaient pas ce nom au XVIIIe siècle, ainsi que la morphologie. Ainsi, il montre que Brittanica ne peut être formé sur l'hébreu baratanac (pays de l'étain), comme on le croyait encore à son époque, dans la mesure où il est formé à partir d'un suffixe latin –icus. [...]
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