Moi et Rien, La visite de petite Mort, Kitty Crowther, visible, invisible, lisible, réalité, album jeunesse, littérature jeunesse, mort, dessin, illustration
La psychoclinicienne Hélène Romano - dans Étude sur la mort - distingue principalement deux périodes : celle où « l'enfant a une vision assez rudimentaire de la mort [où] le recours à l'imaginaire est très présent », puis celle acquise « progressivement [de] la mort [comme] universelle et irréversible » même si « persiste encore la confusion entre la mort et un mort ». L'enfant - en grandissant - transformerait la mort d'un statut « irréel » (l'imaginaire) à un statut « réel » (la prise de conscience, la compréhension).
Comment la littérature jeunesse peut-elle se saisir de cette double vision « irréel/réel » pour familiariser son lectorat avec la mort ? Quels rôles prennent le texte et - spécificité de l'album - l'image pour dire l'indicible (ou le « difficilement dicible ») et montrer l'invisible ?
[...] Il est écrit : « Elsewise parle alors de sa maladie et de la douleur qui ne la quittait jamais. Maintenant elle n'a plus mal. Elle est bien. » Par ailleurs, nous pouvons différencier assez facilement le rapport entre « la mort/l'homme » et « la mort/Elsewise ». L'homme n'est jamais nommé par son prénom : le texte utilise des termes génériques qui incluent tout le monde, y compris le lecteur : « . des gens qui vont mourir », « Jamais personne ne lui parle », « Les gens pleurent. [...]
[...] C'est bien la Mort qui reproduit les gestes de Elsewise. Sur l'illustration nous voyons la jeune enfant se travestir en la Mort, utilisant un masque souriant et « déguisant » la faux de La Mort pour lui donner la forme d'un pélican. Il s'agit bien ici par l'image d'offrir aux lecteurs une autre perception de la mort, paradoxalement joyeuse. La transformation de la faux meurtrière en oiseau coloré donne ce message : qu'il est possible de parler de la mort avec l'enfant, mais que le message doit être adapté. [...]
[...] Ce sont des indices visuels qui renvoient au monde du lecteur qui le permettent : l'homme est chauve, voûté, au visage marqué et la jeune fille a le teint rosé, les cheveux blonds, etc. La polysémie du terme « mort » (dead people) est alors scindée iconiquement : le premier personnage est triste, il pleure alors que la jeune fille accepte sa mort, elle est heureuse . Il existe pourtant un « dénominateur commun » entre ces deux personnages : l'image de La Mort/Petite Mort. [...]
[...] Mais toute cette « visibilité » peut être « illisible », c'est-à-dire qu'elle nécessite une connaissance préalable et une interprétation du « lecteur ». Pour le jeune lectorat, cette profusion de symboles apparaît a maxima comme un message adressé à son subconscient. Le texte dit : « Elle frappe sans faire de bruit, frappe doucement à la porte et, timidement, s'approche des gens qui vont mourir ». Pouvons-nous dire pour reprendre la terminologie de Sophie Van Der Linden que « texte et image » ont un rapport de redondance ou de collaboration ? [...]
[...] Nous examinerons deux albums de l'auteure belge Kitty Crowther : La visite de petite Mort et Moi et Rien. Nous essayerons d'analyser dans un premier temps quelques problématiques linguistiques pour ensuite aborder l'exposition (textuelle et iconique) qu'offrent ces deux albums. Dans un souci pratique, quelques illustrations prises en exemple seront indexées après la conclusion. Problématiques linguistiques Nous pouvons d'abord appréhender la complexité pour reprendre la terminologie saussurienne du signe mort et cette difficulté pour un jeune lectorat d'en saisir le sens, d'autant que les images viennent en modifier notre conception. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture