Une société est constituée d'individus différents ayant des désirs distincts, sinon opposés, les uns aux autres. Afin de limiter les conflits et la vendetta (principe de la vengeance conduisant à une escalade de la violence), des normes permettant de distinguer le bien d'avec le mal ont besoin d'être posées à travers des réglementations légales conventionnelles.
Cependant, si les valeurs morales sont réduites à des valeurs sociales, alors on ne peut plus penser que des biens et des maux, et non un bien et un mal qui auraient valeur universelle. La question se pose de savoir « Le bien et le mal sont-ils des valeurs conventionnelles ? »
[...] Dans Le contrat social, Rousseau postule qu'« aucun homme n'a une autorité naturelle sur son semblable Par conséquent, l'expression de l'autorité ne peut être que conventionnelle et passer par les voies de la législation. Bien que la contingence des valeurs morales soit légitime, les hommes ont besoin d'une convention morale qui fasse autorité par-delà la diversité des cultures afin de pouvoir vivre, commercer et établir, plus généralement, des relations de toutes les natures sans rencontrer une impossibilité factuelle majeure que serait alors la diversité des valeurs morales. [...]
[...] Selon Kant, le bien et le mal relèvent de la raison, non de la société. Ce qui est bien, c'est que nos actes soient réalisés de manière désintéressée, en considérant que la maxime qui préside à notre action puisse être suivie en toutes circonstances par tous les individus, en sorte que sa moralité soit universelle et universellement reconnue Des conventions universelles peuvent-elles être établies et dans quel but ? Finalement, qu'est-ce qu'une convention ? Accord liant entre eux des individus au sein d'un superstrat (famille, clan, société, civilisation . [...]
[...] En effet, si l'omnipotence divine laisse les hommes libres du choix entre bien et mal, il ne reste plus aux hommes qu'à établir cette distinction par convention. L'ethnocentrisme occidental, cristallisé par les croisades et les conquêtes, nous a montré de quelle manière les Européens se sont servis du prétexte religieux et de la notion absolue de bien et de mal pour condamner à l'asservissement ou à la destruction des peuples non christianisés. C'est pourquoi poser le bien et le mal comme des valeurs issues de conventions nous ouvre à plus de tolérance vis-à-vis des autres cultures. [...]
[...] Dans le Troisième Reich, le mal avait perdu cet attribut par lequel on le reconnaît généralement : celui de la tentation. De nombreux Allemands, de nombreux nazis, peut-être même la totalité d'entre eux, ont dû être tentés de ne pas tuer, de ne pas voler, de ne pas laisser partir leurs voisins pour la mort (car ils savaient, naturellement, que c'était là le sort réservé aux Juifs, même si nombre d'entre eux ont pu ne pas en connaître les horribles détails) et de ne pas devenir les complices de ces crimes en en bénéficiant. [...]
[...] Aussi, le bien et le mal, jugés à l'aune de cette révolution démocratique deviennent-ils affaire de jument personnel. Porter un jugement moral sur ses propres actes et ceux d'autrui devient même la valeur caractérisant en propre la liberté subjective de l'individu. L'homme, adulte, n'aurait plus besoin de s'en remettre à une autorité extérieure, capable qu'il est devenu de déterminer lui-même la frontière entre Bien et Mal. Pour Rousseau, la conscience, principe inné de justice et de vertu (Émile ou de l'Éducation, Garnier, p.351), nous offre la possibilité de remettre en question les valeurs conventionnelles sociales. [...]
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