Je propose ici les idées directrices de cet exposé afin que le lecteur sache dès le début où je veux en venir. Car, si la philosophie de Kant connaît un regain d'intérêt parmi les théoriciens de la physique moderne, il faut être prudent avec les assimilations hâtives.
Kant n'avait pas l'ambition de répondre aux problèmes de la mécanique quantique, que bien évidemment il ne connaissait même pas ! Il me faut cependant reconnaître que certaines idées des théories physiques modernes semblent coïncider avec certaines conséquences (pas toutes) du système kantien, comme par exemple : le fait que le temps et l'espace n'aient pas de réalité en soi, ou bien le fait que l'on considère la chose en soi (dans les termes modernes, la réalité quantique) comme inconnaissable.
Pourtant, entre les raisons des physiciens modernes et celles de Kant, il y a une profonde différence. Cette profonde différence m'encourage à penser que, non seulement les pseudo-philosophes modernes qui s'intéressent à l'épistémologie scientifique via Kant ne peuvent aboutir à une réelle compréhension de la physique moderne, mais aussi que les physiciens qui cherchent, dans les textes de Kant, des réponses aux problèmes que leur posent aussi bien la mécanique quantique que la théorie de la relativité, n'ont aucun intérêt à ne jurer que par Kant. Loin de moi toutefois l'idée d'ériger une sorte de frontière insurmontable entre philosophie et physique ; mais je pense que la révolution qui s'est opérée en physique au cours de ce siècle doit encore réaliser un travail d'affinage de ces concepts, tandis que la philosophie doit rompre avec une phraséologie idéaliste douteuse et surtout dépassée par les progrès de la physique (j'insiste sur le mot progrès, car les philosophes ont souvent tendance à se servir des problèmes de la physique pour les retourner comme des preuves des limites de notre connaissance !). C'est cela que je voudrais, non pas prouver, car la tâche est trop grande pour moi, mais tout au moins en donner comme l'idée…
Pour cela, je m'assigne pour tâche, dans cet exposé, de faire en sorte que le lecteur parvienne à comprendre les intentions profondes de Kant, sa façon de penser, de voir le monde, de raisonner dessus. A terme, le lecteur, un tant soit peu au courant des recherches fondamentales en physique, pourra ainsi se faire une idée sur la valeur ou non des analogies entre cette dernière et l'épistémologie kantienne.
[...] Tel est le matérialisme que l'agnostique répudie. Quel est donc le fond de sa tendance ? C'est qu'il ne va pas au-delà des sensations ; qu'il s'arrête en deçà des phénomènes, se refusant à voir quoi que ce soit de certain au- delà des sensations. Nous ne pouvons rien savoir de certain de ces choses en soi. L'idéaliste nie la possibilité de parler des choses mêmes, de connaître de façon certaine leur existence. C'est le credo de toute la philosophie agnostique, de Berkeley à Mach, en passant par Hume, Kant, etc. [...]
[...] D'Espagnat B., physique et réalité, Diderot éditeur Clavier P., premières leçons sur la critique de la raison pure de Kant, Puf Kerszberg P., Kant et la nature, p21. Idem, p25. D'Espagnat B., traité de physique et de philosophie, p327. On en viendrait à l'aberration, d'un point de vue kantien, d'une preuve matérielle, expérimentale, de la chose en soi et de son inaccessibilité à l'esprit humain. Or, c'est parce que l'entendement humain ne peut accéder au domaine de l'infini, étant trop petit, que Kant nous interdit de connaître la chose en soi. [...]
[...] Doit-on en déduire que nous ne pouvons appréhender le monde en soi, dans son universalité, puisqu'il nous en manque 85% ? Ou bien que cette matière noire est une chose en soi inconnaissable (ce qui n'est pas tout à fait la même chose) Kant n'en aurait certainement pas jugé ainsi. Tout simplement parce qu'il admet le progrès des instruments de mesure des scientifiques. Ce qui m'a surpris d'ailleurs, car la plupart des commentateurs de Kant tiennent sa doctrine pour fixiste. Ce qui est sans doute vrai, mais mal compris m'avait induit en erreur. [...]
[...] Kant, fondements de la métaphysique des mœurs. Kant, CRP, dialectique transcendantale, des raisonnements dialectiques de la raison pure, pp 287-290 idem, p300&305. Kant, prolégomènes à toute métaphysique future. F. Alquié, la critique kantienne de la métaphysique. Comprendre : morale. Kant, CRP, préface à la seconde édition, p22-23. [...]
[...] La connaissance n'est donc qu'un effort pour se ressouvenir Pour appuyer ses dires, Platon fait rentrer en scène un esclave qui ne connaît rien à la géométrie. Simplement en lui posant des questions, sans jamais l'orienter, on réussit à lui faire trouver la solution d'un problème de géométrie, le doublement du carré. Ainsi, comme Kant, Platon fonde la science géométrique sur des idées qui ne nous viennent ni de l'expérience, ni de l'entendement seul. Kant, CRP, dialectique transcendantale, des concepts de la raison pure, pp262-266. Idem, p274. [...]
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