Dans le contexte médiéval et patristique, le langage de l'amitié fait plus que constater : support de l'amitié pour ceux qui sont éloignés – l'amitié épistolaire -, il sert également de support théorique, relançant ainsi la réflexion antique sur la nature de l'amitié et élaborant une doctrine de l'amitié. Les figures de style, tournures, vocabulaires et artifices rhétoriques utilisés révèlent ainsi les catégories de pensée à travers lesquelles est appréhendée, et donc vécue l'amitié.
Ce travail analyse le langage de l'amitié à partir de quelques textes patristiques et médiévaux : si des remarques générales peuvent être tirées de ces lectures, elles ne prétendent pas s'appliquer à toute la littérature médiévale sur le sujet.
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[...] Ne restent pour le moment que ces deux passions mêlées, que la réflexion n'a pas eu le temps de séparer. La fusion de ces deux sentiments se retrouve dans la pluralité de genres présents dans le sermon de Bernard de Clairvaux. En effet, ce texte est un éloge à son ami disparu, mais également une longue lamentation qui exprime son sentiment d'abandon. Plus encore, la tonalité élégiaque du texte mon cœur m'abandonne reflète la déréliction de l'auteur privé de tous secours y compris de celui de la religion. [...]
[...] Thomas d'Aquin cherche à établir le degré le plus juste d'amour selon l'objet, se demandant s'il faut aimer son fils plus que son père, ou son épouse plus que ses parents. Le méta-discours sur l'amitié reflète la complexité de cette notion, que le langage tente d'appréhender, d'organiser et de clarifier. Il s'agit, par cette clarification, d'orienter la pratique de l'amitié, mais ce discours se base lui-même sur l'expérience amicale. Il cherche plutôt à concilier la réflexion théologique, les bases religieuses, avec la relation affective interpersonnelle. [...]
[...] Sagesse de l'amitié II, p. 237-245. Saint Augustin, Confessions, IV, IV - IV, IX in Sagesse de l'amitié II, p. 186-182. Paulin à Sévere, son frère bien aimé, lettre 11, trad. Ch. Pietri, in. [...]
[...] La rhétorique au service de l'amitié Clairvaux ne se situe plus ici dans la lignée des textes théoriques sur l'amitié ; certes, il en expose les fonctions (l'aide et le secours apporté par l'ami) et montre son lien avec les thèmes bibliques de la mort, de la résurrection et de la communion des saints. Mais, de manière plus frappante, c'est la pratique de l'amitié, et de son versant émotionnel et douloureux, qui sont accentués ici par les talents de l'orateur. Il s'agit moins de convaincre de la nécessité de fonder l'amitié dans la religion comme chez saint Augustin idée qui n'est cependant pas absente chez Bernard de Clairvaux - que de lui rendre sa dimension humaine, avec toute la vulnérabilité que celle-ci implique. [...]
[...] L'amour recouvre alors deux notions : la caritas et l'amicitia, dualité qui se retrouve dans le discours sur l'amitié tout au long de la période patristique et médiévale. La caritas, en tant qu'amour universel, doit se rapporter à tout être humain, quels que soient ses défauts : L'amitié ne doit pas être enfermée dans des limites étroites, car elle enveloppe tous ceux auxquels l'amour est dû.[4] Ce terme d'amour, dans lequel la notion de dilectio n'est pas totalement absente, est tout de même essentiellement l'amor : l'amour universel, ou charité. [...]
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