Mémoire de Philosophie politique (Master) : "La satisfaction du désir anthropogène de reconnaissance : l'interprétation kojévienne de Maîtrise et servitude dans la Phénoménologie de l'Esprit de Hegel".
[...] Parce que le maître est reconnu comme celui qui a su s'arracher à la nature, l'esclave, qui le redoute, lui rend cet honneur en travaillant pour lui. C'est l'esclave qui finira par accomplir sa propre humanité : par le travail auquel il est forcé par le maître. Il se libère de la nature (du besoin et de son propre désir). Le travail a donc lui même une dimension anthropogène, c'est à dire libératrice. par la reconnaissance qu'il reçoit à travers son œuvre, reconnaissance réciproque entre esclaves-artisans. Du coup, le rapport de servitude s'inverse puis disparaît (renversement dialectique et dépassement de la contradiction). [...]
[...] Lapouge Quinzaine littéraire). Si on le comprend à la lumière de la Phénoménologie de l'Esprit, Napoléon signifie plus et autre chose que la fin de l'Histoire européenne chrétienne. Il exprime le début de la construction de l'État universel et homogène. C'est pourquoi la fin de l'Histoire n'apparaît pas seulement pour Kojève comme une question simplement littéraire ou religieuse, mais devient consciemment l'enjeu premier et dernier de la réalisation du savoir philosophique. Puisqu'il y a une discontinuité entre la Révolution russe et la Révolution française, comme entre Marx et Rousseau, Staline et Napoléon, c'est donc que Hegel achève bien en la comprenant, l'histoire politico- culturelle chrétienne, mais c'est en conférant à la seule conscience bourgeoise un savoir absolu d'elle-même. [...]
[...] Comment expliquer l'infléchissement que Kojève fait subir au développement de l'autoconscience ? Dès lors que la Phénoménologie de l'Esprit n'est plus considérée comme le développement interne d'une substance moniste, la pluralité des consciences s'engendrant mutuellement est une conséquence implacablement logique du processus de fracturation homme / nature, entraîné par la finalisation du savoir absolu Si, pour Hegel, la nature désigne l'Esprit s'apparaissant à lui-même avant de se réfléchir, elle devient ipso facto, dans le mouvement de scission entre le Temps originairement fini (pour soi) et l'Esprit absolu non fini (en soi), un pôle d'indifférenciation primordiale dont l'antécédence et l'autonomie n'appartiennent plus, par définition, à l'auto-engendrement du Concept. [...]
[...] Et c'est ainsi qu'en fin de compte tout travail servile réalise non pas la volonté du Maître, mais celle - inconsciente d'abord - de l'Esclave, qui - finalement réussit là, où le Maître - nécessairement - échoue. C'est donc bien la Conscience d'abord dépendante, servante et servile qui réalise et révèle en fin de compte l'idéal de la Conscience-de- soi autonome, et qui est ainsi sa " vérité (p34) Ainsi, à partir du moment où l'homme s'avère comme désir, négativité, langage, dans l'asymétrie du regard d'un autre homme, le monde, qui au départ n'était que nature, devient provisoirement Nature + Homme. [...]
[...] Le processus de l'anthropogenèse s'enclenche sur cette asymétrie ou instabilité foncières, qui autorisent l'interdépendance dynamique du lien noué entre serf et souverain, et constitueront la source du renversement dialectique. Or la reconnaissance n'est satisfaisante que s'il y a reconnaissance réciproque et donc égalité entre les protagonistes du conflit. Le maître est donc dans une impasse, puisqu'une contradiction mine la position du maître : il est reconnu, mais par quelqu'un de non libre, qu'il ne reconnaît pas lui-même comme humain : il ne peut donc reconnaître pleinement sa propre humanité dans le regard de celui à qui elle est refusée. [...]
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