Liberté, religion, dieu, raison, contingence, antinomie, Kant, Platon, Spinoza, Hegel, Leibniz
Kant présente, dans la Préface, son travail comme synthétique, réservant l'analyse des concepts (pour cette partie, correspondant à la Première Critique) à la Métaphysique de la Nature. Cette dernière concerne, en tant que partie pure de la philosophie théorique, la détermination d'un objet dont la partie pratique concerne la réalisation : éminemment, la Liberté.
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Le libre arbitre, tout à fait distinct de la liberté, est empirique. Il intervient dans la détermination de la liberté, idée de la Raison pure - théorique et pratique - par le choix contingent que Kant appelle « choix du caractère intelligible » ; mais, en tant que tel, il n'est pas la liberté, ou n'est pas nécessaire. Il ne relève même pas, comme tel, de l'analytique transcendantale, mais de la logique appliquée ou de l'usage empirique de l'entendement. Quant à la liberté, elle est dialectique, donc critique : raison pour laquelle elle s'offre à l'Antinomie.
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Rappelons que l'Antinomie, ou raisonnement hypothétique, vise l'unité absolue de la série des conditions du phénomène, l'idée du Monde ou de l'Univers qui n'est lui-même qu'une Idée. Les catégories concernées sont celles seulement qui visent une synthèse sérielle régressive de conditions subordonnées jusqu'à l'antécédent supposé inconditionné : quantum, matière, cause (et non-substance), nécessité eu égard à la contingence.
[...] Comme l'on sait, Russell réduit le leibnizianisme à cinq axiomes. Le troisième nous intéresse éminemment : « Les propositions vraies qui n'affirment pas l'existence à des moments particuliers sont nécessaires et analytiques, mais celles qui l'affirment à des moments particuliers sont contingentes et synthétiques ». Relevons que cet axiome résout l'opposition entre nécessité et contingence en divisant le temps sur le mode de la seconde Antinomie kantienne, « combinée » à la première. Il existerait des « atomes de temps », les moments. [...]
[...] En ce cas, les mondes -ou les substances- « manquants » seraient, sans contradiction, inexistants. Les propositions relatives à leur identité comme sujets sont alors synthétiques. Kant maintient cette position : l'existence elle-même n'est pas un prédicat que l'on puisse tirer du sujet par analyse. Les prédicats qui se succèdent, pour une même substance -ou sujet- sont eux aussi contingents relativement à l'existence leur correspondant dans le moment (par exemple, entrer au Sénat pour César), mais leur lien n'en est pas moins rationnel, non de non-contradiction (Dieu aurait pu créer César sans cet acte) mais de raison suffisante, ce qui ménage une place pour la liberté. [...]
[...] D'un passé éternel au sens de la simultanéité -de l'éternité proprement dite, appréhendée comme une crase- l'irrévocabilité peut aisément être niée, et l'on retombe alors dans l'interprétation de Cléanthe, où la nécessité n'est pas « inscrite » en soit, mais réapparaît sous condition d'un éternel retour : la nécessité devient contingence en « fin de cycle » cosmique, puis réapparaît en tant que nécessité. Il y a ainsi -chez Cléanthe- un instant absolument « libre », qu'on ne peut dire lui-même « éternel » puisqu'il pourrait ne pas réapparaître. Ni nécessaire ni contingent, il est l'Eternité : « révocable » dans la mesure où rien n'y advient -il n'y a pas de causa sui. Ce système est proche de l'ockhamisme où la prédétermination n'inclut pas la nécessité causale, raison pour laquelle Duns Scot la rejettera explicitement. [...]
[...] Dans un tel système - que les logiciens démontrent être équivalent à celui de Spinoza, au « choix du meilleur » près (la perfection requérant ce choix en Dieu- on peut admettre l'équivalence de la nécessité et de la liberté. Dieu - et Dieu seul- est en effet, chez Spinoza, à la fois cause libre et cause nécessaire (Ethique, I). C'est par contre la liberté humaine qui devient problématique : la solution de l'aporie est d'ordre mystique, l'âme devenant, au l.V, « sous-ensemble » de Dieu lui-même. [...]
[...] L'Antinomie -la troisième- concerne la temporalité, l'auto-affection du Moi qui ne peut saisir qu'empiriquement, comme libre-arbitre, l'instant de la décision morale, faute de s'intuiter intellectuellement. De même, dans le champ de la philosophie théorique, le temps comme intuition interne est condition de la détermination de la succession causale, mais ne fournit nulle intuition du sujet comme liberté ou arbitraire. La Dialectique transcendantale est la logique de l'Apparence. Nous savons que celle-ci mérite le nom -critique- de dialectique parce qu'elle étend, en violation de la logique générale (sous condition de la phénoménalisation) le jugement au-delà de sa fonction qui est de subsumer sous des règles. [...]
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