« Le peuple appelle éloquence la facilité que quelques-uns ont de parler seuls et longtemps, jointe à l'emportement du geste, à l'éclat de la voix, et à la force des poumons », la formule de La Bruyère caractérise le sens unilatéral du discours, de l'orateur vers le public. Et pourtant, Jean-Denis Bredin affirme que « tout discours est en réalité un dialogue. Tout monologue est un dialogue, un dialogue avec celui qui écoute. L'éloquence ne permet pas d'être seul ». Il observe ici le caractère bilatéral du discours. En effet, ce dernier ne serait pas purement figé dans le débit d'un discours, sans aucun retour avec le destinataire. Au contraire, le discours provoquerait un dynamisme entre l'orateur et celui qui écoute, un échange apparaîtrait entre les deux parties. L'éloquence permettrait donc d'établir un lien intime entre l'orateur et le destinataire.
[...] En ce sens, Est-ce qu'il ne faut pas, pour parler de belle façon, que celui qui parle connaissance la vérité en ce qui concerne le sujet ? tel est l'enjeu de la dernière partie du Phèdre qui affirme que le critère premier d'un beau discours est la vérité. Ce dialogue aussi bien avec autrui qu'avec soi-même en lien avec la vérité permet d'accroître le pouvoir de persuasion sur celui qui écoute, car la vérité se présentera comme supérieure face aux idées reçues. [...]
[...] Il met en lumière la puissance des discours qui peuvent aussi bien intégrer l'individu que le mettre sur le banc de la société via un discours manipulateur, en soif de pouvoir. Il est donc évident que les discours sont une arme à double tranchant, qu'il faut par conséquent maîtrisé, et ce par une parole avisée. Néanmoins, cet idéalisme semble se heurter à la nature humaine paradoxale, en proie à des conflits morales entre désirs et qualités éthiques. Tout porte à croire que seul la connaissance et la maîtrise de soi peu améliorer notre rapport au discours, et donc notre rapport au monde. [...]
[...] Cependant, la pièce de Mariaux ne montre pas de monologue, au premier sens du terme, mais plutôt un aparté qui s'intègre directement au dialogue, donnant ainsi l'occasion au personnage de dire ce qu'il pense au public. Ce type de monologue a donc pour but de libérer le personnage de ses soucis devant le public pris pour confident. Ce rôle sera aussi bien tenu par Araminte, un moment seul, laisse échapper sa pensée : La vérité est que voici une confidence dont je me serais bien passée moi-même 15) que par Verlaine qui montre son mal-être : Il pleure dans mon cœur comme il pleut sur la ville Ainsi ce dialogue implicite permettrait également de communiquer les sentiments de la personne à celui qui écoute, ici le public ou le lecteur. [...]
[...] Ainsi, à ce stade, nous pouvons donc affirmer que l'éloquence ne permet pas d'être seul Dès lors, l'utilisation des sentiments peut être un moyen de convaincre celui qui écoute à son avis. Il existe plusieurs méthodes pour captiver une foule, et ainsi être le plus habile des écrivains ou un grand orateur Dans ce but, l'orateur doit faire preuve de talent concernant l'éloquence, deviner les attentes de la foule, se mêler à elle afin d'en faire ressortir une adhésion. C'est de cet enjeu que naît un lien intime entre l'orateur et la foule, qui ne reste pas inerte face à un tel discours. [...]
[...] A première vue, le monologue semble être une contradiction, puisqu'il s'agit plus un genre littéraire qu'un dialogue. Le protagoniste se retrouvant seul à discourir, il est alors de ce fait, seul avec ses pensées, et lui-même. Cependant, le monologue reste paradoxalement une forme de dialogue, car il s'adresse déjà au public pour le plonger dans le cadre de l'intrigue. Le théâtre de Marivaux donne pleinement moyen à cet effet grâce à cette situation de double énonciation dans sa représentation avec le public. [...]
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