Tocqueville

Résumé du document

Si Alexis de Tocqueville naît dans une vieille famille aristocrate, il n'en est pas moins l'un des plus brillants analystes de la démocratie en même temps qu'un fervent défenseur de la liberté. Il a ainsi la chance de vivre dans une époque tourmentée, riche en évolutions politiques et sociales. Or son plus grand souci est de comprendre la raison de tant de bouleversements, tout en proposant un modèle de société capable de concilier liberté des individus et stabilité politique. Ainsi, comment un individu issu d'un milieu monarchiste attaché à ses privilèges a-t-il pu entrevoir avec autant de clairvoyance l'avenir politique français ?

Extraits

[...] Or une telle société semble dangereuse à Tocqueville : 2-la menace du centralisme : selon lui, rien n'est plus dangereux que cette situation. Le centralisme donne naissance à un Etat surpuissant et omniprésent, en face duquel les citoyens apparaissent désarmés. Les citoyens risquent alors de se désintéresser pour la vie publique, et ce processus trouve son aboutissement logique dans le despotisme (les deux épisodes napoléoniens sont donc dans la continuité du processus de centralisation). Pour remédier à de telles dérives, Tocqueville propose un modèle de démocratie libérale : La démocratie libérale au secours de la société française : Tocqueville est convaincu que toute société évolue inévitablement vers la démocratie ; il met donc en garde contre l'avènement prochain, irrésistible, universel de la démocratie dan le monde ».Or si ce régime porte en lui un grave danger, il peut aussi être aménagé de façon à promouvoir la liberté de chacun : 1-la démocratie et ses avatars : la démocratie porte en elle l'affirmation et la reconnaissance de l'égalité des individus. [...]

[...] Et cette indépendance partielle des paysans est un facteur puissant de frustrations. En même temps, Tocqueville considère que la France est le pays où les individus sont devenus les plus semblables entre eux : tous les hommes au dessus du peuple se ressemblent par leurs richesses et par leur culture, faute de se ressembler en droit. La bourgeoisie a ainsi rejoint une noblesse le plus souvent en déclin, mais la juridiction demeure favorable aux nobles, ce qui est là encore source de frustration. [...]

[...] D'où deux grandes conséquences politiques : soit la souveraineté de tous, soit le pouvoir absolu d'un seul sur tous. Dans la pratique, Tocqueville est persuadé que la deuxième tendance l'emporte ; et même la souveraineté de tous apparaît comme une situation déséquilibrée puisqu'il s'agit en fait d'une tyrannie de la majorité. La passion de l'égalité conduit également les individus à se replier sur eux-mêmes : alors que l'Ancien régime permettait une certaine continuité entre les générations du fait de la faible mobilité sociale, et un lien direct entre citoyens par le biais de la hiérarchie, tous ces liens disparaissent avec la démocratie. [...]

[...] Voilà ce qui est vrai Là est la vraie certitude politique de Tocqueville. Il gagne néanmoins en responsabilités politiques en 1848 en participant à la rédaction de la nouvelle Constitution ; il s'oppose alors à la reconnaissance du droit du travail qui serait source selon lui d'étatisation de la société. Au sein du gouvernement Barrot, il est ministre des Affaires étrangère, et entretient de bons rapports avec Louis Napoléon Bonaparte. Cependant, il ne peut accepter le coup d'Etat et rejette la proposition du prince qui voulait le maintenir à son ministère. [...]

[...] Toute l'œuvre de Tocqueville a donc le mérite de démontrer que l'égalité sans la liberté conduit à la servitude ; et les totalitarismes ont été des illustrations tragiques de la justesse de cette analyse. En même temps, il élabore un libéralisme différent de celui de Constant (plus basé sur un repli délibéré de l'individu dans la sphère privée). Mais Tocqueville a surtout été un penseur de son temps dans le sens où toutes ses études avaient pour but d'éviter à sa société de sombrer en lui offrant une alternative capable de garantir la liberté. Il a donc été à la fois lucide et visionnaire. [...]