Max Weber, dans L'éthique du protestantisme, définit le mode de croyance établi par et après la Réforme comme celui de « l'ascétisme séculier ». Il faut ici penser le terme séculier par opposition à un ascétisme régulier. L'ascétisme régulier fait appel à un détachement complet du réel, il est pure transcendance, il est à rattacher à une relation purement spirituelle. Au contraire, l'éthique établie par la Réforme s'inscrit dans le siècle, elle trouve ses fondements dans le domaine du réel, du temporel. Ainsi pour répondre aux exigences de leurs principes religieux les protestants se doivent d'accumuler au maximum le capital qu'ils ont gagné pour pouvoir le réinvestir par la suite. Leur réussite financière est, d'une certaine manière, à l'image de leur réussite religieuse. La religion née de la Réforme parvient donc à réconcilier partiellement le spirituel avec le temporel. Elle s'intègre dans un processus de désenchantement du monde.
[...] La liberté de conscience que se propose d'atteindre la religion civile repose donc sur le fait que la religion civile n'est pas vraiment religion. Sa profession de foi n'est pas dogme mais lien de sociabilité La religion civile cherche donc à emprunter les cadres de la religion sans en être une complètement. Cela conduit Rousseau à une vision particulière de la liberté de conscience. Pourtant est-ce réellement cela la liberté de conscience ? Même si l'on veut bien concéder à Rousseau sa conception de la liberté de conscience, la religion civile nie cette liberté d'une autre manière. [...]
[...] Se demander si la Religion civile de Rousseau est séculière, c'est donc vouloir savoir si elle parvient, ou plutôt si elle peut parvenir, à atteindre les buts qu'elle s'est fixée. La religion civile parvient-elle à être séculière, à s'inscrire complètement dans le temporel, sans prendre en compte une quelconque dimension régulière, spirituelle ? Nous sommes donc amenés à nous demander si la religion civile est une vraie religion. Mais une religion en plus d'être définie par son rapport avec le divin doit également être définie comme une attache de la conscience. [...]
[...] On l'a aperçu auparavant, la religion civile est une religion. Ni complètement séculière, ni complètement régulière elle vise cependant l'adhésion totale des consciences. Rousseau veut qu'elle permette de garantir la conformité de chaque volonté particulière à la volonté générale En cela la religion civile aurait une vocation totalisante sur les esprits, vocation qui l'empêcherait de parvenir à son but de liberté des consciences. Tout l'enjeu est donc de savoir si la religion civile est vraiment une religion. Et si l'on reprend la définition que nous avons posée de la religion, cela semble bien être le cas. [...]
[...] (Nous reprenons ici la distinction faite par D. Hume entre belief et faith) Et si la religion civile parvient à être religion (telle que nous venons de la définir), peut-elle toujours assurer la liberté de conscience qu'elle se propose d'atteindre ? Ainsi, s'interroger sur la sécularité de la religion civile, c'est se demander si la religion civile peut à la fois avoir des visées d'unité politique et être une religion. Peut-on faire correspondre religion et sécularité ? LES PROPRIETES INTRINSEQUES DU CONCEPT A. [...]
[...] Les bonnes institutions, selon Rousseau, sont celles qui sont capables de transporter le moi dans l'unité commune. Vers un totalitarisme des consciences ? Rousseau pose également la nécessité d'un autre accord, composé de dogmes positifs (cf introduction : existence divinité puissante ) et d'un dogme négatif (la proscription de l'intolérance). Mais à peine énoncée cette profession de foi prête à discussion : l'Etat ne va-t-il pas reproduire les excès inquisitoriaux tant reprochés au pouvoir monarchique ? N'est-ce pas elle qui va conduire aux dérives révolutionnaires ? [...]
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