Dans son Projet de paix perpétuelle, Kant entend consigner les articles définitifs qui rendent possibles les conditions juridiques grâce auxquelles toute guerre deviendra impossible. Il conçoit la paix comme un projet à long terme, comme un idéal à atteindre, et considère l'avènement du droit comme le seul salut politique, car de sa mise en œuvre découle, selon lui, l'établissement de la paix...
[...] On peut donc dire que la question de la paix est plus complexe que ce que Kant l'avait imaginé. Elle n'est peut- être pas insoluble, mais elle requiert une compréhension bien plus radicale que ne l'avait fait Kant à la fin du XVIIIème siècle. Il semble que le philosophe contemporain Raymond Aron ait davantage saisi les véritables enjeux de la question et ses véritables problématiques dans son ouvrage Paix et guerre entre les nations. [...]
[...] Cela explique que le premier traité stipule qu'aucun traité de paix ne doit laisser supposer en réserve une guerre future. Article 2 : Aucun Etat indépendant (petit ou grand, peu importe ici) ne saurait être acquis par un autre Etat par héritage, échange, achat ou donation : Nous savons très bien que les guerres de l'histoire se sont le plus souvent organisées autour de la maîtrise, de la conquête d'un territoire. Il est clair de ce fait que toute frontière est en un sens arbitraire, résultat d'un compromis historique. La guerre pose en effet le problème de la propriété. [...]
[...] Ce que Kant n'a pas vu, c'est l'importance des facteurs économiques dans l'origine des guerres. Il n'a pas vu non plus l'importance des idéologies comme ciment des coalitions dans la guerre. Il a fait appel à la bonne volonté des politiques, il a lancé un appel à la raison pour que triomphe le Droit, de manière un peu trop naïve, avec une sorte de foi en l'homme. Il n'a pas non plus discerné l'importance des processus inconscients dans l'apparition de la violence, ce que Freud a bien compris dans la théorie du refoulement. [...]
[...] Nous ne pouvons pas ici ne pas faire le rapprochement avec la structure de l'ONU et la déclaration universelle des droits de l'homme, assorti du tribunal international. Mais Kant ne reconnaît pas la valeur d'un Etat mondial unifié et s'en tient seulement à l'idée d'une fédération d'Etats libres. Il lui semble peu souhaitable de demander aux Etats de fusionner dans un seul Etat mondial, ce qui supposerait un seul peuple, ce qui n'est pas le cas. Le seul point sur lequel il importe que les Etats s'entendent, c'est sur la nécessité de se soumettre à des obligations légales qui vont au-delà des particularismes de leurs volontés d'Etat, dans la reconnaissance d'un droit universel. [...]
[...] Cependant, cette force de répulsions qui tend à éloigner les êtres humains les uns des autres est compensée par une force d'attraction qui fait qu'en même temps l'homme ne peut se passer de la proximité et de l'aide d'un autre homme. Kant fournit plusieurs exemples étonnants pour montrer la prévoyance de la nature. Il entend par là montrer que l'Histoire humaine ne s'est pas faite au hasard. Cela ne signifie pas que la Nature a voulu la guerre. C'est l'homme qui veut la guerre, cela veut dire seulement que quand la guerre apparaît, la Nature sait en quelque sorte l'utiliser pour qu'il en ressorte finalement un bien. [...]
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