- L'immense ouvrage de Montesquieu, De l'esprit des lois, découle tout entier d'un postulat fondateur et fondamental : tout un faisceau de lois commandent le comportement des hommes et le guident en profondeur.
- La vie humaine est non seulement déterminée par un ensemble de facteurs plus ou moins conscients, mais en plus, Montesquieu estime qu'il est possible d'expliquer les phénomènes par la raison : en effet, selon lui, une rationalité est puissamment à l'oeuvre dans le réel ; cette rationalité se traduit par les lois multiples qu'il va précisément s'agir de découvrir (...)
[...] Si les lois d'un peuple doivent être adéquates, adaptées à ses particularités irréductibles, elles doivent cependant en même temps participer à la raison humaine. Lorsqu'il se penche sur les divers gouvernements et qu'il cherche à démonter leur ressorts, Montesquieu met en lumière différents critères, différents principes de variation, à commence par des critères qualitatif (le système de lois est-il fixe ou non, ou suit-il, par exemple, les caprices du souverain et quantitatif (combien d'hommes tiennent les rênes du pouvoir : un seul? Quelques-uns? Tous?). [...]
[...] Un tel régime est immanquablement marqué du sceau de l'arbitraire. Etre libre revient à obier à des lois, à condition qu'elles soient rationnelles et légitimés. La liberté ne peut émerger que dans des gouvernements modérés (par définition, le despotisme la nie), où il est possible d'agir à son gré dans l'espace circonscrit par la loi. Dans les gouvernements modérés, les lois sont fixes et établies : il n'y a pas de rapports de force personnels, les règles du jeu sont fixées . [...]
[...] Remarquons au passage que dans la réalité, les rapports ne sont jamais parfaits : l'idéalisme de Montesquieu reste relatif. Cependant, le relativisme est de mise : il s'agit, pour qu'une loi soit adéquate à une situation donnée, qu'elle s'adapte, en raison d'une variété infinie de mœurs et de pratiques. Toute loi doit donc obéir à des principes de variations fondamentaux. L'essentiel est que toute société repose sur un tout un système de rapports, si bien que les lois ne sauraient en aucun cas (et idéalement, du moins, car dans certains régimes, cette donnée cruciale n'est évidemment pas respectée) être arbitraires. [...]
[...] Ainsi, Montesquieu assimile le monde et les sociétés à une toile complexe pétrie, tissée de relations, de rapports réciproques; de multiples interactions y ont lieu, de même que des phénomènes rétroactifs. Charles Bonnet qualifiait non sans justification Montesquieu de Newton des rapports humains L'esprit des lois forme en fait tout un réseau de lois qui aboutissent au droit positif : c'est, en somme, pourrait-on dire, la loi des lois . Ces données de base étant posées, il est évident que la tâche du législateur s'avère pour le moins complexe; aussi Montesquieu va-t-il qualifier de sublime la mission de celui qui, dans un puissant effort de synthèse, s'efforce de saisir le plus parfaitement possible l'esprit des lois, et ce afin de donner à telle ou telle société singulière les meilleures lois, le meilleur gouvernement en fonction des circonstances, du système de lois positives déjà existant, de la religion, des mœurs, du climat, de l'histoire de cette société etc . [...]
[...] L'insécurité est permanente dans ce gouvernement de passion, et non de raison. Dans de tels régimes, les pouvoirs ne sont en aucun équilibrés, la modération tant louée par Montesquieu est absente : l'agencement du pouvoir constitue un véritable tapis rouge à de multiples abus . Cette politique, qui relève du simple fait, va jusqu'à nier l'instinct viscéral de conservation de soi en menaçant en permanence la vie des populations ; c'est par conséquent un régime morbide, sans rationalité, qui est aux yeux de Montesquieu une valeur fondamentale . [...]
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