La liberté, c'est faire ce qui nous plaît.
Bien sur que non : il plaît à l'alcoolique de boire, au junkie de se piquer, au sadique de torturer : trois exemples d'aliénation humaine. Très souvent, au contraire, être libre, c'est précisément faire ce qui nous plaît pas : on est plus libre à dire la vérité qui nous déplaît plutôt que le mensonge qui nous plaît. Il faut suivre sa pente, disait l'écrivain André Gide, mais pourvu que ce soit en montant. On peut être enchaîné par ses passions, par son plaisir. La liberté n'est ni l'envie, ni la spontanéité, ni la licence (...)
[...] Mais l'état ne risque t'il pas d'empiéter sur la liberté alors même qu'il prétend la défendre ? Puis l'absence de justice est ruineuse pour la liberté. Jaurès disait du capitalisme que c'était le système du renard libre dans le poulailler libre. Dans une situation d'inégalités fortes, la liberté n'est plus que le privilège de quelques-uns (les riches). Mais aucune justice ne s'établit spontanément : il faut un pouvoir, dont la force peut à son tour menacer la ou les libertés. Aucune solution objective n'existant, la tâche des sociétés est d'aboutir aux meilleurs compromis possibles. [...]
[...] Au sein du malheur, il s'est toujours trouvé au moins une voix pour dire non ! Tu n'es qu'un imbécile ! Même sous la menace de mort, je ne me soumettrai pas à toi ! C'est peut être d'ailleurs une marque de l'humain que cette présence du sens au sein de la négativité : le malaise sait mieux que le bien portant ce qu'est la bonne santé. Si l'on nous demande de définir la liberté, nous sommes embarrassés. En revanche, nous savons tous ce que signifie l'absence de liberté : la prison, l'esclavage, la mort. [...]
[...] Le monde de l'économie, du travail et de la propriété est, en effet celui de la concurrence : le poste que j'occupe, les autres ne l'auront pas, le bien dont je jouirai, les autres en seront privés. Mais la liberté ? Elle n'est pas une marchandise, elle est une valeur. Le monde des valeurs, à la différence de celui des marchandises, n'est pas celui de la concurrence, c'est celui de la solidarité : ma liberté de penser n'est pas limitée par celle de l'autre, au contraire, elle est garantie par elle. Etre libre consiste à être soi même. Apparemment, oui : l'esclave ne peut être lui-même. [...]
[...] Pour être libre, il ne suffit pas de sortir de prison ; encore faut il savoir ce qu'on va faire en dehors de la prison. Etre libre c'est n'obéir qu'a soi même. Oui a condition que le soi même soit le porte voix de la raison, ce qui est rare. Et puis, n'oublions pas à quel point le soi peut être divers et changeant. Il est loin de constituer cette force homogène et stable que l'idée d'identifié nous donnerait à penser. Obéir à soi meme, certes, mais à quel soi ? [...]
[...] Car si l'homme n'est pas libre, et signifie qu'il n'est pas responsable de ce qu'il fait. Et s'il n'est pas responsable, cela signifie qu'on ne peut pas raisonnablement le punir s'il a mal agi. On comprend que Nietzsche ait pu dire que la liberté est la métaphysique du bourreau : la société a besoin de croire à la liberté des individus pour pouvoir les châtier en cas de crime. Kant a tenté de concilier les deux points de vue : celui d'une stricte nécessité et celui d'une liberté incompréhensible. [...]
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