La constitution d'un savoir suppose la prétention à l'universalité de ce savoir. Le savant (dans le sens de ''celui qui sait'') n'entend pas formuler des connaissances dont la validité se limiterait à des cas particuliers, singuliers. Il prétend, au contraire, acquérir une connaissance qui puisse valoir de manière générale et non pas singulière. Dire d'une table qu'elle est jaune, petite, rectangulaire n'est que fournir des indications sur une table particulière. Le savoir a pour objet, non pas les caractères de telle ou telle table, mais ce qui permet de dire que cet objet est une table. Autrement dit, le savoir vise ce qui fait que la table est une table (...)
[...] Autrement dit, cette exigence philosophique est paradoxale. Contre l'opinion, le philosophe Socrate, c'est-à-dire l'amoureux du vrai savoir, montre qu'on ne peut accéder à la vérité qu'à la condition de se débarrasser préalablement des illusions de l'opinion. C'est dans cette perspective que doivent être compris les premiers dialogues de Platon (dits dialogues socratiques), où l'on voit Socrate interroger un général sur le courage, un prêtre sur la piété, un gymnaste sur la beauté A chaque fois l'interlocuteur de Socrate n'avance que des exemples, et c'est pourquoi Socrate l'amène à reconnaître qu'un exemple ne constitue pas une définition. [...]
[...] On peut aussi dire que la faculté sensible appréhende la chose en tant qu'elle apparaît. Apparaître'' se dit ''phaïnomaï'' en grec, ce qui ''est en train d'apparaître'' se dit ''phaïnomenon'', ce qui donne en français ''phénomène''. On peut dire que l'ordre sensible (le monde sensible), l'ordre existentiel (le monde existentiel) est aussi l'ordre phénoménal. Au-delà de la chose en tant qu'elle apparaît, il y a la chose en soi, indépendamment de son apparition. Telle est du moins la conviction de celui qui prétend accéder à un savoir universel : viser l'essence, la chose en soi, telle qu'elle demeure toujours identique à elle-même à travers la diversité phénoménale, sensible, existentielle. [...]
[...] Chez Platon, cette distinction ontologique est posée comme une véritable dichotomie (du grec , signifie couper en deux), entre 2 mondes : d'une part le monde sensible, existentiel, phénoménal, marqué par le changement et la différence, d'autre part le monde intelligible que Platon appelle aussi le monde des essences ou monde des idées pures pures de tout élèment sensible). De même que le menuisier doit d'abord concevoir l'idée de table avant de produire une table sensible, de même le monde intelligible précéde ontologiquement le monde sensible. La chose sensible dépend donc de l'idée pure ou essence qui lui correspond. Mais le monde intelligible, pour Platon, ne dépend pas du monde sensible. [...]
[...] Il y a donc de l'idée en toute chose, autrement dit, il y a de la vérité en toute chose. C'est pourquoi l'esprit soucieux de savoir doit s'intéresser à toute chose afin de découvrir la vérité qui y est déposée. C'est donc pour cela qu'Aristote est le fondateur des sciences de la nature (biologie, botannie ) et, de manière générale, des sciences d'observation. Indépendamment de cette différence entre la version platonicienne et la version aristotélicienne de l'idée, il reste en commun que l'essence se situe toujours du côté de la vérité et cette affirmation que le savoir vrai doit n'avoir d'autre visée que l'être vrai, c'est-à-dire l'essence ou l'idée. [...]
[...] Dire d'une table qu'elle est jaune, petite , rectangulaire n'est que fournir des indications sur une table particulière. Le savoir a pour objet, non pas les caractères de telle ou telle table, mais ce qui permet de dire que cet objet est une table. Autrement dit, le savoir vise ce qui fait que la table est une table. C'est donc l'être même de la table qui est ici recherché. se dit en latin, on parlera donc de l'essence de la table. Le discours qui dit cette essence est la définition de la table. [...]
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