Commentaire d'un extrait de La Curée de Zola, commentaire de 2 pages de l'extrait suivant
Cependant la fortune des Saccard semblait à son apogée. Elle brûlait en plein Paris comme un feu de joie colossal. C'était l'heure où la curée ardente emplit un coin de forêt de l'aboiement des chiens, du claquement des fouets, du flamboiement des torches. Les appétits lâchés se contentaient enfin, dans l'impudence du triomphe, au bruit des quartiers écroulés et des fortunes bâties en six mois. La ville n'était plus qu'une grande débauche de millions et de femmes. Le vice, venu de haut, coulait dans les ruisseaux, s'étalait dans les bassins, remontait dans les jets d'eau des jardins, pour retomber sur les toits, en pluie fine et pénétrante. Et il semblait la nuit, lorsqu'on passait les ponts, que la Seine charriât, au milieu de la ville endormie, les ordures de la cité, miettes tombées de la table, noeuds de dentelle laissés sur les divans, chevelures oubliées dans les fiacres, billets de banque glissés des corsages, tout ce que la brutalité du désir et le contentement immédiat de l'instinct jettent à la rue, après l'avoir brisé et souillé.
[...] Bref, dans ce passage, Paris est progressivement personnifiée selon toute une trame de thèmes qui font. puissamment image ; c'est l'incarnation même du mal, immense, irrémédiable ; c'est comme une personne agitée dans son sommeil par la fièvre et qui se détraque dans la folie avant de mourir (dans « un grand râle d'amour furieux et las »). Ce Paris, à travers la vision que nous en donne Zola, offre les caractéristiques d'un géant protéiforme et d'un monstre. Qu'on est loin d'un tableau réaliste, pittoresque, ou d'une photographie Le lexique utilisé ici ne craint ni l'hyperbole ni le baroque (« colossal », « grande débauche », « grand râle », « embrassade énorme » . [...]
[...] Tout paraissait lui réussir. Conseils et suggestions pour rédiger un commentaire écrit ou oral de cet extrait : Partir, dans l'introduction, de l'idée que Zola, qui se présente comme un romancier naturaliste, affirme que le narrateur doit adopter un point de vue impersonnel. On se pose alors la question de savoir si les Rougon-Macquart qui mettent en scène l'histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire répondent rigoureusement à cette exigence ou s'ils n'expriment pas, de manière tout aussi importante, un tempérament lyrique. [...]
[...] Ne préfère-t-il pas, aussi bien pour parler d'Aristide Saccard que de l'élite sociale parisienne, peindre un vaste tableau qui frappe par son lyrisme ? On s'intéressera donc d'abord aux faits d'ordre historique et social tant pour Saccard que pour Paris avant de montrer que dans cette page narrative, Zola est avant tout un poète visionnaire, cédant pour des raisons esthétiques à de puissantes hallucinations. I – Les faits : ils intéressent des personnages précis (Saccard et sa classe sociale) et la ville de Paris, les spéculations immobilières de l'ère haussmanienne, la recherche sans frein du plaisir. [...]
[...] C'était l'heure où la curée ardente emplit un coin de forêt de l'aboiement des chiens, du claquement des fouets, du flamboiement des torches. Les appétits lâchés se contentaient enfin, dans l'impudence du triomphe, au bruit des quartiers écroulés et des fortunes bâties en six mois. La ville n'était plus qu'une grande débauche de millions et de femmes. Le vice, venu de haut, coulait dans les ruisseaux, s'étalait dans les bassins, remontait dans les jets d'eau des jardins, pour retomber sur les toits, en pluie fine et pénétrante. [...]
[...] On pourrait alors considérer tout le passage comme une complexe allégorie de Paris et des nouveaux riches de ce temps. On le lit à travers les comparaisons, les métaphores et les symboles que déploie Zola sous nos yeux. Les richesses du couple Saccard sont un immense brasier brûlant au coeur de Paris, évoquant l'intensité d'une frénésie incontrôlable. L'époque est vue comme le moment de la curée au cours d'une chasse, le narrateur ne craignant pas de mentionner l'aboiement des chiens, le claquement des fouets, le flamboiement des torches : il s'agit bien d'une vision très éloignée des réalités pratiques de la spéculation immobilière, mais sa violence nous frappe (on nous fait entendre jusqu'au fracas des immeubles qui s'effondrent). [...]
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