Le fait que tous les hommes, dans leur pratique, cherchent à obtenir un bien : objet sexuel, argent, pouvoir, honneur, etc.. Mais ces biens ne sont pas recherchés pour eux-mêmes, mais comme moyens susceptibles de rendre heureux. Existe-t-il un bien qui vaudrait pour lui-même et non pas comme moyen relativement à autre chose ? Un tel caractère définit le souverain bien (summum bonum). Il n'est pas un réel distinct de l'existence effective des hommes, mais relève de ce que l'opinion nomme bonheur (eudaïmonia). Il est la fin réelle de toute existence humaine.
[...] VERSION COURTE Qu'est-ce qu'agir ? C'est viser un bien. Existe-t-il un souverain bien ? Oui : ce que chacun nomme le bonheur. Comment le déterminer ? En réfléchissant ce que fait le spoudaïos, c'est- à-dire en agissant selon le principe de l'excellence ou vertu. En quoi consiste la vertu ? En une méditée relative à ce qu'on est. Comment l'obtenir. Par un exercice constant à la modération, sous l'autorité d'un homme prudent (phronimos). [...]
[...] Bien agir, c'est donc agir comme agirait l'homme prudent, c'est-à-dire en fonction des circonstances, faire ce qu'exige d'un homme excellent la situation, une fois que l'on a hiérarchisé ses différents aspects, et réfléchi ce dont on est capable. Il s'ensuit que la question principale est celle de la détermination des moyens permettant d'atteindre la fin : de celle-ci on ne délibère pas. Toute la difficulté de la praxis est de saisir ce qui, ici et maintenant, est utile au bonheur. D'où l'insistance mise sur la délibération (bouleusis), moment où l'agent inscrit son action dans une conjoncture particulière et toujours plus ou moins aléatoire. Y a-t-il un risque de relativisme ? [...]
[...] En apparence oui. En fait il s'agit plutôt d'une ontologie de la contingence, soulignant l'impossibilité d'une science de la pratique, l'exigence d'avoir à calculer concrètement ce qu'est, ici et maintenant, la modération. Exigence d'avoir à se constituer comme sujet éthique dans le souci de soi, dans la réflexion sur ce qu'on est, sur son désir et les conditions dans lesquelles on agit. Se faire un maître de soi. Se gouverner soi-même pour être digne de gouverner les autres. Ce qui est essentiel puisque cela constitue le fond de la concorde, c'est-à-dire du vivre ensemble des hommes, d'un accord avec soi-même (philautie) et avec les autres (amitié). [...]
[...] D'une part, le monde de l'activité humaine est un monde instable, tramé de contingence : il n'y a donc pas de modèle universel de la bonne action. Il s'ensuit d'autre part que l'action vise un certain équilibre, toujours précaire. Ce qui constitue une réévaluation de l'expérience sur la théorie. C'est ce que signifie la dimension centrale jouée par la prudence dans ce raisonnement. Qu'est-ce que la prudence (phronésis) ? Elle est une vertu non pas éthique, mais intellectuelle (dianoétique), vertu orientée à la pratique. [...]
[...] Il y faut de la prudence, vertu intellectuelle orientée à la pratique : non pas science, trop générale, mais pensée de la conjoncture particulière permettant de comprendre ce qu'il faut faire ici et maintenant pour ne pas être soumis, pour être maître de soi, se gouverner. D'où il ressort que le vrai bonheur ne peut pas être dans l'agitation, mais dans la contemplation. Bonheur divin sans doute, mais qui donne sens à l'existence humaine. Ethique de la maîtrise : devenir maître de soi grâce à l'éducation d'un maître, condition pour gouverner les autres. [...]
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