Pour Kant, l'art ne peut avoir pour but d'imiter la réalité. C'est à partir de là qu'il faut considérer le primat que Kant accorde à la beauté naturelle sur la beauté artistique. En effet, ce que demande la raison, c'est que la nature et l'esprit soient réconciliés comme ils le seraient du point de vue d'une science achevée ou d'un entendement infini, omniscient comme doit l'être l'entendement divin. Mais pour offrir un quelconque intérêt, encore faut-il que cette réconciliation vienne de la nature elle-même. Elle ne saurait être artificiellement produite. Ce qui plaît à la raison dans le beau tient précisément à cette contingence. Le jugement réfléchissant suppose toujours que l'accord de la nature et de l'esprit soit en son principe contingent, donc naturel, puisqu'il procède du particulier au général et non l'inverse. C'est à ce prix que l'objet beau reste toujours pour nous une surprise. Puisque la beauté ne relève pas du jugement déterminant, il ne peut y avoir d'art poétique, de science du beau qui déterminerait tout à la fois les règles génériques de la production de la beauté ainsi que leurs justes critères d'appréciation
[...] L'art authentique devra donc comporter une part de naturalité, un élément qui échappe au contrôle de la subjectivité et de la conscience des objectifs qu'elle peut s'assigner dans la production de l'œuvre. C'est de ce point de vue que Kant introduit l'idée de génie. En effet, c'est à travers lui que la nature donne ses règles à l'art L' idée esthétique qui guide le génie ne se conçoit ni ne s'énonce clairement : Aucune expression, désignant un concept déterminé, ne peut être trouvée pour elle Elle possède donc en elle une part de naturalité, on ne peut en rendre compte d'un point de vue logique. [...]
[...] La réalité reste néanmoins l'horizon de l'art en tant qu'il la désigne comme multiplicité infinie d'apparences, d'illusions. Ce dont veut rendre compte cet art, c'est de la subjectivité fondamentale de la réalité dans laquelle nous vivons. Ainsi, la notion de réalité pose problème à partir du moment où l'art ne fait plus signe vers un monde commun. Avec l'autonomie croissante de l'art par rapport à la réalité, c'est la notion même de réalité qui se désagrège en une multitude de points de vue subjectifs qui ne renvoient plus à un monde objectif commun. [...]
[...] Cette présentation doit donc être indirecte, c'est-à-dire symbolique. Kant affirme de la sorte que le beau est le symbole du bien moral En effet, dans l'art, le sujet est en relation avec quelque chose qui n'est ni nature au sens de nature déterminée par des lois ni liberté le beau n'est pas le bien mais qui est lié avec le fondement de la liberté, c'est- à-dire le supra-sensible. Dans ce quelque chose, le pouvoir théorique la nature et le pouvoir pratique la liberté sont accordés d'une façon inconnaissable. [...]
[...] Ainsi, la réalité supra-sensible que nous présente l'art indirectement a une réalité en soi. Cela signifie par ailleurs que nous partageons tous cette réalité, et c'est ce que qu'exprime le sens commun qui pose que celui qui déclare que quelque chose est beau entend bien que chacun est obligé de donner son approbation à l'objet considéré et de le déclarer beau également Ainsi, l'art n'imite pas la réalité sensible, matérielle, puisque la beauté même procède d'une naturalité qui ne se laisse pas mettre en règles, et qui donc est indépendante de toute réalité conceptuelle historique. [...]
[...] Ce premier art témoigne du sentiment d'une réalité spirituelle mais que la forme ne parvient pas à exprimer. Le symbole qu'il utilise représente l'idée d'une façon qui reste équivoque et qui marque l'indétermination de l'idée même. L'exemple le plus significatif est celui des pyramides, qui se présente comme le symbole de l'individualité spirituelle car elle renferme la momie, mais cependant elle ne fait que renfermer le support de l'esprit, elle ne le présente pas en tant que tel. Ainsi, ces œuvres d'art restent mystérieuses et muettes Dans un deuxième temps, qui est celui de l'art classique dont la forme la plus élevée est la statuaire grecque, l'art présente une plus grande conscience de la réalité de l'esprit, en tant qu'il met en scène des individualités. [...]
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