Bien que la sélection génétique dans le but d'améliorer les espèces soit une science remontant à la préhistoire, les règles qui président à la transmission des caractères héréditaires ont commencé à être scientifiquement établies beaucoup plus récemment, avec Gregor Mendel en 1865. Appliquées à la transmission des caractères héréditaires humains, certaines des questions que pose la génétique deviennent des questions existentielles, touchant à la nature même de l'homme (« qui suis-je », « d'où viens-je », « que m'ont transmis mes parents et que transmettrai-je à mes enfants »). C'est pour cette raison que la génétique a eu des répercussions sociales et individuelles sans précédent comparé aux autres sciences. Les questions soulevées par l'avènement du génie génétique (l'ensemble des techniques permettant de faire réaliser par un être vivant tout ou partie du programme génétique d'un autre être vivant) sont encore beaucoup plus amples, le génie génétique marquant une rupture sans précédent, un saut qualitatif extraordinaire pour le biologiste. En effet on dispose pour la première fois, pour améliorer une race ou une variété, non plus simplement de l'ensemble des gènes de l'espèce – que l'on peut sélectionner par des croisements judicieux – mais de l'ensemble des gènes de l'ensemble des être vivants de la planète. Le génie génétique va ainsi constitue donc une source sans pareille d'outils de savoir, de prédiction et de transformation. Il contient cependant en germes des problèmes éthiques.
[...] L'exercice de la liberté comprend alors la liberté de ne pas vouloir être informé (le droit de ne pas savoir est d'ailleurs reconnu par la loi française). Cependant, que l'individu choisisse d'être informé ou pas (d'effectuer un test génétique ou pas), des questions d'ordre éthique se posent à lui quel que soit son choix. La question la plus difficile est celle de l'utilisation des tests génétiques dans l'accession à l'assurance et au travail : la génétique a ici des répercussions sur la justice sociale. [...]
[...] Enfin, le mythe prométhéen de la création de la vie pose la question : est- il ou non éthique de créer une vie humaine pour une autre finalité que la vie humaine qui pourrait en dériver ? Si l'on s'appuie sur la définition de Kant, la seule justification éthique pour créer une vie humaine est cette vie humaine. Tout procédé qui créerait une vie humaine, non pas dans le désir que cette vie humaine puisse, le cas échéant, s'épanouir, mais afin de constituer du matériel biologique, à des fins de recherche, de transfert de cellules ou de transfert d'organe serait contraire à l'éthique. [...]
[...] Comment justifier une IVG pour une maladie qui survient et ne dégrade l'individu qu'à partir de 40 ans ? Inversement, comment justifier de ne pas effectuer le diagnostic lorsque cette maladie est si fréquente dans certaines régions (Amérique du Sud) et décime des familles entières, à tel point que de nombreuses personnes pour lesquelles cette maladie représente une menace préfèrent ne pas avoir d'enfant que courir le risque de leur promettre un tel destin ? De même, que faire face au développement probable des diagnostics prénatals des maladies psychiatriques à base génétique ? [...]
[...] Liée à cela est l'une des réflexions d'Axel Kahn portant sur les liens entre génie génétique et justice sociale. Le risque d'un développement des tests génétiques dans les systèmes d'assurance et d'accès à l'emploi risque d'amener à ce que l'illusion selon laquelle tous les hommes naissent et demeurent égaux en dignité et en droit soit abandonnée puisque les droits réels des personnes ne seraient plus que ceux que leur laissent leurs gènes. Une telle réflexion rappelle le rôle crucial de la démocratie et de la protection des droits humains, le droit étant le seul instrument possible pour limiter des atteintes probables à la liberté et à la dignité humaine dans le futur. [...]
[...] C'est le mythe du devin, auquel renvoie la possibilité de prédire l'avenir biologique des personnes, qui pose actuellement le plus de problèmes éthiques. Les possibilités actuelles de diagnostic prénatal, vouées à se développer considérablement à l'avenir, soulèvent des problèmes éthiques très difficiles à résoudre dès lors que la maladie diagnostiquée est incurable. Dans les cas extrêmes, il ne se pose généralement pas de question éthique (exemple d'une maladie génétique gravissime, incurable, entraînant irrémédiablement la mort dans des souffrances atroces à la fois pour la famille et pour l'enfant, souvent avant même qu'il se soit ouvert à une conscience du monde extérieur et accédé à la communauté humaine). [...]
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