Roland Barthes. La Chambre Claire

Résumé du document

Il s'agira de voir comment la contradiction subjectif/objectif peut se résoudre chez Barthes. Ce thème sera le cœur de notre réflexion. Par extension (nous insistons sur ce fait) nous verrons ce que Barthes peut nous dire de la photographie et de notre regard sur elle : que contient la photographie ? Qu'y voyons-nous ? Que peut-on y trouver ? Que peut-on raisonnablement en attendre ? Quel est le rapport existant entre universalité et subjectivité dans la photographie ? Cette contradiction dépassée (prolégomènes inévitables et nécessaires) nous verrons alors comment la photo de presse est vécue au quotidien et quelles sont les conséquences de la pensée barthésienne sur la photo de presse

Extraits

[...] La définition du beau (qui ne sera par nature jamais atteinte), pour être approché, doit passer par un dialogue honnête et sérieux entre des subjectivités qui pensent voir quelque chose qui les dépasse dans une œuvre. On atteint alors une universalité d'un nouveau type, non pas scientifique (c'est à dire proche de l'objectivité), mais inter-subjective. La chambre claire est un ouvrage qui va dans ce sens : Barthes objective sa subjectivité et montre ce qu'il voit dans la photographie, il pousse sa subjectivité au maximum dans ce qu'elle peut être en matière de généralité. C'est aussi, sans doute, pourquoi l'ouvrage n'a pas été toujours bien reçu. [...]

[...] Barthes prend le partie d'objectiver son rapport subjectif à la photographie. Nous sommes bien là dans une logique de réflexion sur la perception. La méthode phénoménologique est convoquée de ce point de vue, pour autant il nous semble que la parenté entre les deux pensées n'aille guère plus loin. La parenté avec Kant est selon nous plus fructueuse, même si moins évidente. Kant est en effet l'un des premiers à résoudre la contradiction de l'objectif et du subjectif. Certes l'enjeu n'est pas le même, chez Kant c'est le beau qui est la finalité de la réflexion, alors que pour Roland Barthes le beau n'est pas l'enjeu premier (même s'il fait parfois référence au talent du photographe). [...]

[...] Deux notions philosophiques au moins font résonance avec le livre de Barthes. La notion de perception dans la phénoménologie, et la notion d'esthétique chez Kant. De la première nous ne dirons pas grand chose. La phénoménologie est à plusieurs reprises convoquée par Barthes pour expliquer sa démarche. Il l'invoque dans la mesure où sa démarche se situe du coté du spectator[4]. Nul envie chez lui d'englober la photographie dans une vaste théorie générale qui relierait celui qui photographie, ce qui est photographié, et celui qui regarde la photographie. [...]

[...] Barthes ressent dans notre modernité une crise de la mort conjointe à une crise des religions. La photographie est notre manière de plonger dans la mort de se confronter à sa platitude L'horreur c'est ceci : rien à dire de la mort de qui j'aime le plus, rien à dire de sa photo, que je contemple sans jamais pouvoir l'approfondir, la transformer. La seule ‘‘pensée'' que je puisse avoir c'est qu'au bout de cette première mort, ma propre mort est inscrite ; entre les deux plus rien, qu'attendre ; je n'ai d'autre ressource que cette ironie : parler du rien à dire CONCLUSION La Chambre claire n'est ni une sociologie, ni une esthétique, ni une histoire de la photo, peut-être une phénoménologie, au sens lâche du terme (Barthes parle de phénoménologie désinvolte) de celle-ci. [...]

[...] Nous essayerons ici de tirer quelques fils du texte, l'objectif étant d'ordonner cette pluralité. Ordonner ne devra pas pour autant être le synonyme d'une réduction. Nous essaierons simplement d'ouvrir le texte, de voir ce qu'il peut nous apprendre sur certains points. Nous nous engageons donc sur quelques niveaux de lecture simplement. La lecture de l'œuvre restera subjective, suivant en cela la méthode propre à Barthes dans La chambre claire. Il s'agira de voir comment la contradiction subjectif/objectif peut se résoudre chez Barthes. Ce thème sera le cœur de notre réflexion. [...]