La Nausée a été publié en France en 1938. A cette époque, la France est affectée par la dépression des Années 30, avec un très fort sous-emploi et de graves scandales politiques. De façon générale, la France ne s'est pas réellement remise de la Première Guerre mondiale dont le coût économique et social fut très élevé, et qui a profondément atteint la base sociale de la République. En 1920 naît le parti communiste français en réponse à l'instabilité politique que connaît le pays. Parallèlement se développe le mouvement littéraire et artistique du surréalisme; « mouvement de libération de l'esprit et de tout ce qui lui ressemble », il réunit, à partir des années 20, écrivains et artistes autour de la personnalité d'André Breton qui recherche « tout ce qui peut ruiner les idées de famille, de patrie et de religion » et prône « une révolte absolue ». Enfin, la phénoménologie de Husserl, reprise par Heidegger, a profondément marqué le début du siècle et est à la base de la philosophie sartrienne. La phénoménologie entend « revenir aux choses elles-mêmes » et « décrire les phénomènes tels qu'ils paraissent au lieu de les expliquer »; l'étude de l'acte de conscience lui-même montre que le sujet ne fait pas partie du monde, mais est ce qui fait qu'un monde paraît. En 1935, dans sa conférence sur « la crise de l'humanité européenne et la philosophie », Husserl déclare que seuls la philosophie et le dépassement du naturalisme permettront d'échapper à « la détresse spirituelle de l'Europe » et à la « chute dans la barbarie » qui la menace.
Le contexte mouvementé de l'Europe des Années 30 et le développement de mouvements protestataires sont des éléments favorables au développement de l'existentialisme, selon lequel « l'existence est absurde, sans raison, sans cause, et sans nécessité ».
[...] Enfin, son style renvoie au courant littéraire surréaliste : le journal intime, l'évocation des rêves de Roquentin, de ses visions, les coïncidences, sa déambulation dans Bouville, la description qu'il fait d'Anny et la relation ambiguë qu'il entretient avec elle rappellent étrangement Nadja d'André Breton, roman fondateur du surréalisme (et le mouvement surréaliste en général). Enfin, La Nausée a un intérêt littéraire. S'il est dit que Sartre utilise la littérature pour mettre en forme ses idées philosophiques, il n'en est pas moins un grand écrivain, et il le prouve dans La Nausée. Il parvient à rendre la sensation de nausée pour ainsi dire perceptible par le lecteur par l'utilisation d'un vocabulaire très riche. [...]
[...] L'existence ne se réduit donc-t- elle qu'au présent ? Enfin, le présent lui-même est paradoxal ; selon Roquentin, une aventure n'existe que si on la raconte. Dans la vie, il n'arrive jamais rien, seul le récit de la vie compte. De ce fait, il faudrait raconter la vie pour que celle-ci prenne un sens. Il semble donc que l'existence de l'Homme soit sans fondement, dans un monde dépourvu de sens. Roquentin décide de mettre fin à l'écriture de la biographie de Rollebon, qui était encore quelques jours auparavant la seule justification de son existence. [...]
[...] C'est la vision d'un galet qui lui donne pour la première fois ce qu'il appelle La Nausée une sorte de dégoût étrange. Sa perception du monde extérieur s'est modifiée, les qualités sensibles des choses se sont mises à l'agresser, et ce galet, sec et humide à la fois, l'a empli de terreur. Devant cette sensation nouvelle, Roquentin entreprend de rédiger un journal afin d'y voir plus clair sur la nature et l'étendue de ce changement ; en effet, qui change ? [...]
[...] Il connaît le succès avec le roman La Nausée en 1938 et le recueil de nouvelles Le Mur en 1939. Mobilisé en 1939, fait prisonnier en 1940 et libéré l'année suivante, il participe à la Résistance en fondant le réseau Socialisme et Liberté et en étant membre du Comité national des Ecrivains. L'ouvrage philosophique L'Être et le Néant (1943) et les deux pièces de théâtre Les Mouches en 1943 (reprise du mythe d'Electre) et Huis clos en 1944, font de lui un des grands représentants de la Liberté et de la Résistance. [...]
[...] Il n'a désormais plus peur de La Nausée. Il livre sa découverte à Anny lorsqu'il la retrouve à Paris quelques jours plus tard. Anny a changé : lasse et vieillie, elle ne croit plus aux situations privilégiées ni aux moments parfaits Désespérée, elle se survit en se réfugiant dans le Passé. Elle confie même à Antoine que les objets la dégoûtent. Ayant la sensation qu'ils ont évolué dans la même direction, il décide de lui parler de la Nausée, de ses angoisses, et de ses découvertes sur l'existence. [...]
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