Micromégas est le premier conte philosophique de Voltaire. Dans celui-ci on peut suivre les péripéties de son héros extraterrestre, Micromégas, exilé de Sirius, il se retrouve d'abord sur Saturne où il se lie d'amitié pour l'un d'eux. Ils partent alors à la découverte de l'univers, jusqu'à s'arrêter sur « notre petite fourmilière », et y rencontrent des « atomes », les humains, et parmi eux « un petit nombre d'habitants fort peu considérés ». Dans cet extrait, les deux géants ont commencé à interroger les philosophes sur leurs connaissances scientifiques et ont obtenu des réponses unanimes et spontanées. Face à un si bel accord, Micromégas leur soumet un problème d'ordre métaphysique. L'harmonie entre les philosophes laisse la place au plus grand des désordres, chacun ayant sa propre théorie. Le premier philosophe à prendre la parole est un partisan d'Aristote. Il s'est ridiculisé, les autres lui succèdent alors.
[...] - Ce n'était donc pas la peine, répondit l'animal de huit lieues, que ton âme fût si savante dans le ventre de ta mère, pour être si ignorante quand tu aurais de la barbe au menton. Mais qu'entends-tu par esprit ? - Que me demandez-vous là ? Dit le raisonneur ; je n'en ai point d'idée ; on dit que ce n'est pas de la matière. - Mais sais-tu au moins ce que c'est que de la matière ? - Très bien, répondit l'homme. Par exemple cette pierre est grise, et d'une telle forme, elle a ses trois dimensions, elle est pesante et divisible. - Eh bien ! [...]
[...] La supériorité intellectuelle de Micromégas ne fait donc aucun doute. Le narrateur insiste sur sa taille extraordinaire : animal de huit lieues un autre sage qu'il tenait sur son pouce Micromégas a la hauteur de vue nécessaire pour interroger les hommes, d'ailleurs ceux-ci le reconnaissent, car il lui témoigne du respect. Micromégas tutoie les hommes : qu'entends-tu sais tu connais tu à l'inverse des hommes qui le vouvoient que me demandez-vous là Micromégas a un ton protecteur et toi mon ami A par le philosophe cartésien, aucun ne prend la parole sans y être invité, et tous se taisent lorsque Micromégas met fin à l'entretien. [...]
[...] Le refus de la métaphysique Micromégas domine la situation au sens propre et figuré. Il a l'initiative du dialogue contrairement au Saturnien qui n'intervient jamais : adressant la parole à un autre sage et toi mon ami, dit-il à un Leibnizien L'omniprésence de Micromégas est justifiée par ses qualités, il a beaucoup d'esprit, et ses voyages lui ont appris la modération et la prudence. La périphrase sage de Sirius met en relief l'antiphrase un autre sage qui désigne le philosophe malebranchiste, est perçue comme ironique quand ce philosophe prend la parole, après l'intervention du petit partisan de Locke, il ne trouva pas celui-là le moins sage Puis Micromégas devient réservé l'animal de Sirius sourit alors que le Saturnien s'enthousiaste le nain de Saturne aurait embrassé le sectateur de Locke sans l'extrême disproportion au risque de se contredire par la suite. [...]
[...] Le discours du philosophe malebranchiste est répétitif, on y trouve cinq fois tout Le leibnizien s'exprime en métaphores à priori interchangeables ou bien si vous voulez ou bien La conclusion du raisonnement cela est clair est une antiphrase ironique. Certes les métaphores proviennent bien des écrits de Leibniz, mais détachés de leur contexte, perdent leur sens. L'habileté polémique de Voltaire consiste à réduire ses théories philosophiques à l'essentiel, sans montrer les étapes ayant permis leurs élaborations. Il prouve ainsi son aversion pour l'ensemble des systèmes philosophiques qui raisonnent à priori et cherchent à imposer leurs points de vue. [...]
[...] Au contraire, il les réduit à quelques propositions caricaturales qui lui permettront d'en souligner les faiblesses et de mieux les tournées en dérision. Les œuvres de Descartes, Malebranche et de Leibniz sont des volumes immenses, le fait de les réduire à quelques lignes montre une volonté de les déconsidérer. Pour Voltaire, elles ne valent pas mieux les unes que les autres. Il est inutile de débattre sérieusement de faux problèmes. Micromégas n'écoute même pas Descartes, il fait un bref commentaire vis-à- vis de Malebranche, et ne répond pas au leibnizien. On comprend alors que ces théories ne méritent même pas d'être discutées. [...]
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