"Métamorphoses du travail. Quête du sens. Critique de la raison économique" de André Gorz

Résumé du document

André Gorz écrit un livre général sur le travail, sa définition, son rôle et ses conséquences sociales. Parallèlement, il réfléchit sur le syndicalisme et la gauche, à l'époque où elle est tentée par le libéralisme ; il joint d'ailleurs, en annexe, un « résumé à l'intention de syndicalistes et autres militants de gauche ». Le point de départ est un paradoxe économique, mais la majeure partie de l'ouvrage présente et met à jour une vision du sujet à dominante marxiste. A ce titre, l'ouvrage est pluridisciplinaire.
Pour sa démonstration, il utilise la philosophie marxiste (de Marx à Habermas), mais aussi la phénoménologie de Husserl, la sociologie de Max Weber ou encore des références allant d'Aldous Huxley à Michel Foucault

Extraits

[...] Cela peut se compléter par les multiples travaux de Noam Chomsky sur la politique, le langage et la propagande. Ou encore avec l'ouvrage de Naomi Klein No Logo. André Gorz fonde la possibilité de changement sur les partis socio- démocrates et les syndicats. Cependant, à l'époque de la conception du livre, il ne pouvait savoir que ce renouveau de la gauche viendrait d'organisations non partisanes (Benasayag et Sztulwark, Du contre pouvoir, 2002). Depuis le début de la crise présente, la production sociale n'a cessé d'augmenter, la quantité de travail rémunéré n'a cessé de diminuer. [...]

[...] La fonctionnalité détermine le travail ; elle est extérieure à l'agent, méconnaissable par lui et possède une finalité. La conduite qu'elle impose vise à ce que l'agent remplisse sa fonction dans l'organisation plus large à laquelle il appartient. Alors, cette dernière tendra à fonctionner de plus en plus comme une machine pour que tout y soit calculable et prévisible. La complexification des appareils économiques et administratifs acquière une dynamique propre et synergique qui a pour conséquence l'atomisation des agents. Ceux-ci perdent alors toute conscience de la machine dont ils sont un des rouages et tombent dans la sphère de l'hétéronomie L'usine taylorisée réalisait l'idéal des patrons des manufactures du XVIIIe siècle Pour contrebalancer ce que Marcuse appelait la sur-répression les travailleurs se voient offrir des consommations compensatoires qui fonctionnent comme régulateurs incitatifs L'Etat-Providence a permis aux travailleurs de mieux supporter les coûts de leurs conditions, sans changer radicalement la nature des faits ni en tentant de substituer à l'hétéronomie de l'autonomie. [...]

[...] Michau, 1981) où le travailleur ne travaille pas tout les jours mais 6 mois par ans intensément et, ensuite, il peut s'adonner à des activités personnelles. Ou encore, par le travail intermittent qui permet aux patrons de donner la charge de travail à faire pour le lundi et charge aux travailleurs de la rendre la semaine suivante. Cela permet la maitrise du temps par le travailleur. Enfin, il maintient que cela peut se faire sans baisse de salaire ; en effet, si celui-ci suit l'évolution de la production et se répartit sur un nombre croissant d'actifs, il peut continuer de croître, le pouvoir d'achat pourra alors être maintenu en diminuant le temps de travail. [...]

[...] Le travail possède une puissance poïétique mais celle-ci est enlevée à l'ouvrier d'une usine. La machinerie et le processus de production dépossèdent le travailleur de ce qu'il produit et le rendent dépendant. Une des conséquences de ce phénomène est la perte de la conscience de classe. A l'organisation scientifique du travail s'ajoute la dépossession des savoirs par la destruction des métiers ; la spécialisation des ouvriers les forcent à maîtriser parfaitement des savoirs partiels, et les savoirs globaux leur échappent. [...]

[...] Par définition, le travail pour soi (ou autonome) l'est aussi. *Consommationisme et émancipation des travailleurs : Plus le travail est contraignant par son intensité et sa durée, moins le travailleur est capable de concevoir sa vie comme une fin en elle- même, source de toutes valeurs ; et plus par conséquent il est porté à la monnayer, c'est-à-dire à la concevoir comme le moyen de quelque chose d'autre qui vaudrait en lui-même, objectivement : l'argent Ce que l'on appellerait aujourd'hui plus volontiers le consumérisme limite les possibilités d'émancipation des travailleurs. [...]