Cette fiche est un compte rendu du chapitre 3 de L'univers irrésolu de Karl Popper. Elle traite de la question de l'indéterminisme dans les théories scientifiques, à travers trois arguments :
- le caractère approximatif de toute théorie
- l'asymétrie entre le passé et le futur
- l'impossibilité de l'auto-prédiction
Elle propose aussi une critique de Popper.
[...] Cet argument se décline en une version intuitive, un argument reposant sur la croissance de la connaissance : la création d'une œuvre originale ne peut être prédite. Dans un monde déterministe, où, par définition, tout l'avenir est contenu dans le présent, aucune nouvelle connaissance n'est possible. Mais l'argument comporte aussi un côté plus philosophique. A la question de savoir si on peut prédire, de façon rationnelle et scientifique, des événements qui n'ont qu'une seule occurrence, Popper répond négativement. En effet, la métaphore du filet montre que le travail de la science consiste à essayer de resserrer le filet sur l'expérience pour la saisir la plus complètement possible. [...]
[...] En effet, comment soutenir l'entreprise de la science si l'on ne peut pas s'appuyer, en dernière analyse, sur un réel déterminé, où les mêmes causes engendrent invariablement les mêmes effets ? Quel projet la science peut-elle se donner si on lui refuse la possibilité de prédire les événements futurs à partir de l'observation attentive des phénomènes et de l'inférence de lois générales ? L'indéterminisme ne vient-il pas limiter, voire annuler la valeur explicative de la science ? En effet, la science définit son projet comme l'élaboration de lois des phénomènes, c'est-à-dire de relations universelles et constantes entre deux phénomènes ou séries de phénomènes. [...]
[...] La causalité semble incontestablement être un principe de l'univers, c'est-à-dire que tout effet singulier a une cause, ou se situe à l'intersection de plusieurs causes. Mais cela n'implique pas, comme en conclue une thèse forte du déterminisme, que deux phénomènes identiques, qui ne sont d'ailleurs peut-être identiques qu'en apparence, aient les mêmes causes. En réalité, ce qui pose problème dans le déterminisme n'est pas tant le concept de cause que celui de prédictibilité. Popper, dans sa critique du déterminisme, prend clairement pour cible le déterminisme laplacien, dans le cadre duquel le déterminisme de la nature implique la possibilité et la légitimité d'un déterminisme de la science, qui implique lui-même la possibilité d'une prédictibilité des phénomènes. [...]
[...] Sinon, il faudrait supposer que nous pourrions prédire des événements inédits, base d'une théorie encore inconnue, ce qui est absurde. Une nouvelle question surgit : celle de savoir, dans le cas où nous serions des intelligences de type laplacien, si nous pouvons prédire nos propres prédictions, ce à quoi Popper répond par la négative (§22). La prédicteur est présenté comme une machine à laquelle toutes les lois universelles de la physique et les méthodes de calcul logique sont inhérentes. Le projet de prédiction revient à une description de l'état initial d'un système S à t0 doublé d'une description de ce système S à t+n. [...]
[...] L'argument est longuement développé Ibid., p Popper, Ibid., p.60 mais il suffira ici d'en rendre la présupposition essentielle : le fait que l'élaboration de la prédiction prend du temps. Ainsi, quand bien même le système serait déterministe, la science ne peut pas l'être. L'auto-prédiction est impossible, soit parce que la machine ne peut pas achever le calcul (si elle ne connaît pas toutes les conditions initiales), soit parce qu'elle ne peut pas donner une description de son propre état au moment où elle reçoit le projet de prédiction. C'est au terme de cette longue argumentation que Popper peut réfuter, formellement et philosophiquement, le déterminisme scientifique (§23). [...]
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