À l'heure où les Européens s'apprêtent à célébrer le cinquantième anniversaire de la signature du Traité de Rome en mars 1957, et malgré le traité de Maastricht en 1992, l'Union européenne éprouve encore des difficultés à se définir, d'autant plus que le rejet, en 2005, du Traité établissant une Constitution pour l'Europe par les peuples français et hollandais entraîne, a priori, un gel de la construction européenne.
Bien qu'il ait publié son ouvrage, L'Europe, l'Amérique et le Monde, en 2004, année pendant laquelle dix nouveaux pays ont intégré l'Union européenne, Jean-Marc Ferry, philosophe et professeur à l'Université libre de Bruxelles, est conscient de l'énorme tâche dont l'Europe doit s'acquitter. C'est ainsi qu'il débute sa réflexion par la difficulté de traiter l'Europe comme d'un ensemble univoque, et distingue l'Europe de l'Union européenne, invitant à considérer les limites de l'Union et les frontières de l'Europe. L'Europe, contrairement au continent américain par exemple, ne présente aucune frontière, et les critères historique et culturel ne sont pas non plus suffisants pour la délimiter. Géophysiquement, la légitimité de l'Europe n'existe pas : elle n'est qu'une péninsule du continent asiatique. Néanmoins, d'aucuns parlent volontiers d'un continent européen. Si l'Europe ne forme pas un continent en soi selon les lois de la nature, elle en constitue, cependant, un en tant qu'oeuvre des hommes. Ce sont en effet ces derniers, pensés comme acteurs de l'histoire, qui, par leurs actions et leurs imaginations, ont donné vie à ce que les Nord-Américains aiment appeler la « vieille Europe ». Aussi, J-M Ferry cherche-t-il les moyens pour l'Union européenne de parvenir à une communauté morale primordiale pour la formation d'une identité européenne, indispensable pour l'acquisition d'un rang international de premier plan fondé sur le respect du droit. Cependant, l'Union doit encore définir la nature et le fond de sa démocratie.
[...] Roosevelt, le 6 janvier 1941, est très emblématique : Pour un avenir dont nous voulons assurer la sécurité, nous voulons un monde fondé sur quatre libertés essentielles : la première est la liberté de parole et d'expression _ partout dans le monde ; la deuxième est la liberté pour chacun d'adorer Dieu à sa manière _ partout dans le monde ; la troisième est d'être libéré du besoin ( . ) _ partout dans le monde ; la quatrième est d'être libéré de la terreur ( . ) _ partout dans le monde. ( . ) Notre nation a placé son destin dans les mains, les esprits et les coeurs de ses millions d'hommes et de femmes libres, et sa foi dans la liberté sous protection de Dieu. La liberté signifie la primauté des droits de l'homme partout. [...]
[...] En outre, cette différence de politique comporte des incidences lourdes de conséquences en ce qui concerne la forme de gouvernement qu'induit chacune d'elle, pour le nouvel ordre international. Ainsi, la voie d'action politique américaine peut être assimilée à la politique de la force qui transforme les États-Unis en gendarmes du monde Cette politique repose avant tout sur l'unilatéralisme, l'interventionnisme et l'anti-réalisme, autrement dit la croyance en la mission messianique des États-Unis pour diffuser les valeurs de liberté et de démocratie. A ce titre, le discours de F. D. [...]
[...] Le défi historique de l'Union réside pour ainsi dire dans la capacité de ses nations à bâtir une culture historique partagée à partir de leur propre héritage culturel. Elles doivent, par conséquent, ouvrir leur mémoire nationale les unes aux autres selon un modèle de consensus par confrontation, autant d'histoires singulières qu'il s'agit précisément de se communiquer afin qu'émerge ce dont une communauté politique post- nationale a tant besoin : une communauté morale. Et J-M Ferry de rajouter : Un travail critique devrait s'exercer sur l'héritage, non pour le détruire, mais afin que la conscience européenne se rende suffisamment réflexive à l'égard du legs spirituel pour effectuer la part de ce qui, dans l'ensemble des traditions héritées, et moyennant une évaluation responsable, mériterait, vis-à-vis du monde, d'être mis en exergue en tant que valeurs de référence Le projet de créer une identité post-nationale suppose, de surcroît, que soit abandonné le schéma vertical d'une intégration étatique au profit du schéma horizontal d'une intégration cosmopolitique. [...]
[...] D'autre part, la voie défendue par Dominique de Villepin d'un modèle multipolaire, dont les fondements sont entièrement distincts des deux précédents modèles prenant en compte les contraintes de la réalité culturelle, géographique et historique, tente de réunir, dans un premier temps, les États au sein d'entités d'échelle continentale ou quasi continentale, puis d'intégrer ces entités dans un ensemble qui serait structuré en fonction des principes en vigueur à l'intérieur de chaque unité macro-régionale (modèle d'isopolite continentale). Ce modèle empêcherait, en dernière instance, suivant J-M Ferry, de diluer et subordonner les nations à un gouvernement supra-national. Il est, de plus, envisageable de voir ce principe de délibération démocratique appliqué aux relations entre les différentes unités post- nationales. [...]
[...] Depuis la fin de la guerre froide, la vision dominante, d'un point de vue économique, est celle d'une opposition entre le Nord, riche et développé, et le Sud, pauvre et sous-développé. Cette opposition est d'autant plus exacerbée qu'elle s'inscrit dans un contexte de mondialisation économique néo-libérale qui semble favoriser les pays industriels du Nord et renforcer la dépendance des pays du Sud vis-à-vis des premiers. Mais, la mondialisation ne se résume pas seulement à des aspects économiques et financiers, elle concerne également les questions écologiques ainsi que le développement de réseaux d'information et de communication qui permettent ainsi de créer des ponts entre les différentes sociétés donnant consistance, virtuellement du moins, à une société civile mondiale. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture