Quand l'expérience nous fait découvrir une relation invariable entre deux choses éloignées ou contiguës, nous concluons qu'il existe une cause secrète qui les unit. Aussi en se demandant : « Qu'est-ce que notre idée de nécessité, quand nous disons que deux objets sont nécessairement liés l'un à l'autre ? » (Traité de la nature humaine, I, III, XIV, page 230), nous serions tentés de poursuivre par l'alternative suivante : est-ce le monde qui se donne à nous selon cet ordre, ou bien est-ce nous qui plaquons abusivement cet ordre sur le monde ? Pourtant Hume, dans son Traité de la nature humaine, ne posera pas la question de l'efficacité des causes en ces termes, mais suivant le problème du livre I de L'entendement , qui soulève la formation de la raison dans l'imagination.
[...] La qualité vient donc de la nature humaine et non de l'idée, car seul le sujet établit des relations : poser le problème des relations, c'est donc poser le problème du sujet. Mais un problème persiste encore. L'association des idées rend compte des habitudes de la pensée et du quotidien, mais elle est incapable de rendre compte de la singularité, de la particularité d'un chemin de pensée, de tel individu, à tel moment, dans telle situation. Le problème devient alors celui-ci : comment justifier cette association-ci plutôt que celle-là ? [...]
[...] La causalité est passion, impression de réflexion, perception de l'esprit et non-déduction de l'entendement. Elle est l'effet de la coutume qui fait cheminer notre pensée selon un ordre, et n'est donc jamais qu'une conjonction constante. L'habitude vient cristalliser les unions naturelles entre les choses selon les principes d'association. La nécessité est donc dans le sujet en tant qu'il contemple, et épouse sa duplicité. Il y a en effet chez Hume une véritable dualité, qui semble faire avancer l'esprit selon deux pentes qui se soutiennent l'une l'autre, celle d'une possibilité et d'une impossibilité de la nécessité, celle de la régularité et celle du chaos. [...]
[...] L'essence de la nécessité n'est pas une idée de la chose en soi, mais la description d'un mouvement entre les choses. La causalité se déduit seulement de l'expérience, elle n'appartient plus à l'immobilité des objets, mais à la mobilité de manière dont nous les lions. Le donné est une collection d'impressions effectives, et la substance elle-même est perception. Parce que l'idée n'est pas la représentation d'un objet, mais d'une impression antérieure, l'équilibre du monde, ou ce qui fait qu'il se maintient, est à l'intérieur même de l'esprit. [...]
[...] Elle est ainsi placée sous le règne de la reproduction, de la fabrication et de la maîtrise technique. Mais parce que toute existence est singulière, la répétition exclut la pure reproduction, qui n'est que spéculation abstraite, fantasme engendré par le chaos environnant. L'observation d'un ordre constant entre deux objets a pour seul effet l'impression interne de l'esprit qu'est sa propre détermination ou disposition à prévoir : cette tendance à dépasser le donné épouse donc la nature de l'idée de nécessité, comme sa sœur impressive moins intense. [...]
[...] La nécessité va apparaître comme ce qui empêche que l'accord de la nature humaine avec la Nature soit un pur hasard contingent. L'enjeu est ainsi de savoir si la finalité va suffire à justifier le fait que la nature humaine soit l'imagination réglée plutôt qu'une règle effective. Qu'est-ce que l'idée de pouvoir d'une chose si le pouvoir n'est pas dans la chose, mais dans l'esprit ? Comment en arrive-t-on à doter une chose d'un pouvoir propre ? Hume a posé à la base de sa philosophie que toute idée dérive d'une impression. [...]
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