Le texte que nous nous proposons d'expliquer ici permet d'éclairer considérablement la pensée de trois auteurs majeurs : Michel Foucault, Gilles Deleuze et Nietzsche. Nous allons en effet commenter un chapitre d'un livre de Deleuze, intitulé Foucault, dans lequel l'auteur tente d'interpréter l'annonce que fait Foucault, à la fin de Les mots et les choses, de la prochaine « mort de l'homme ». Comme Deleuze replace dans le même temps Foucault au sein d'une filiation nietzschéenne, cette déclaration antihumaniste peut être rapportée au concept problématique de surhomme qu'avait développé Nietzsche.
On sait que l'idée du surhomme avait pu être récupérée par les idéologues nazis, lors de leurs tentatives d'embrigadement de la pensée nietzschéenne. Ce texte de Deleuze constitue à ce jour la seule tentative valable et conceptuellement solide permettant de donner à ce concept un sens à la fois subversif et progressif ; il nous apprend en effet que « la mort de l'homme », loin de constituer un désastre, permettra peut être au contraire l'émancipation réelle des vivants que nous sommes. Peuvent ainsi être posées les bases d'un antihumanisme de gauche.
[...] Tous les "langages" (codes surpliéés) pourront êêtre transcrits et traduits, mais grââce àà une conception de la traduction qui ignore les notions de signification et de "sens" pour leur prééféérer les forces et leurs rapports, et explorer ainsi toutes les possibilitéés ouvertes par un vitalisme qui est aussi et avant tout un pragmatisme. [...]
[...] "forces d'imaginer, de se souvenir, de concevoir, de vouloir . " On voit ici que le "donnéé" n'implique pas un mode d'êêtre substantiel; les "forces donnéées" ne sont pas des forces en acte mais des potentialitéés plurivoques, des modes possibles de la force. "L'homme" en qui ces forces sont donnéées n'est pas alors une substance ou un sujet qui possééderait ces forces; il n'est pas encore une force. Le terme déésigne simplement une "réégion de l'existant", c'est àà dire un certain lieu dans la zone stratéégique des forces, un lieu d'application et d'action des forces. [...]
[...] Les forces ne sont ni rééelles ni idééelles; elles sont toujours les deux àà la fois. Rééelles en tant qu'elles sont jusqu'àà un certain point "donnéées" comme ensembles de forces et de plurivocitéés (l'invention de la forme-homme n'a rien àà voir avec la naissance d'un premier humain existant), idééelles car elles sont toujours l'objet d'interpréétations, àà tous leurs niveaux.Mais en fait cette spéécification est encore fausse, car la distinction entre rééel et idééel est subvertie: le seul "rééel" qui subsiste est surabondant et protééiforme, quant àà l'idééel (l'interpréétation qui produit des sens et des formes), il concerne aussi bien les "contenus" (pratiques du corps) que les "expressions" (discours); le traitement des expressions lui mêême (les expressions, le discours, les éénoncéés, éétant ce qui se rapproche le plus chez Foucault de ce que nous déénommerions instinctivement "domaine idééel" dans un schèème de penséée plus traditionnel) se faisant encore sur le mode d'un matéérialisme (un matéérialisme mééthodologique, un matéérialisme de l'incorporel: une pragmatique des éénoncéés). [...]
[...] Le "vitalisme" deleuzien, nietzschééen (au sens oùù la capacitéé d'interpréétation originellement déévolue aux seuls vivants est universaliséée, qu'elle est placéée en chaque point de l'êêtre, ce qui permet àà celui-ci d'apparaîître dans sa plurivocitéé fondamentale, c'est àà dire d'exhiber àà la fois sa finitude et ses possibilitéés illimitéées) éémerge donc comme la penséée philosophique qui rend possible et pensable le surhomme comme nouvelle forme, nouveau rapport de composition de l'homme avec des forces du dehors qui opèère sur le mode du surpli. Un matéériau donnéé (sons, acides aminéés, silicium), fini, peut êêtre combinéé àà l'infini et rééaliser ainsi des possibles inouïïs. Il convient toutefois de prééciser que le "matéériau" ainsi déésignéé ne saurait êêtre penséé sur le mode de la matièère finie, ni mêême sur celui de la matièère forméé (ce qui ôôterait toute puissance plastique et crééatrice au matéériau, en faisant de ses composants de simples briques stéériles). [...]
[...] Si l'ensemble de ce livre a un statut un peu particulier (Deleuze commente Foucault; son travail n'est pas une doxographie mais une reprise fééconde, un dialogue permanent dans lequel il est impossible de savoir ce qui est "Foucault" et ce qui est "Deleuze"), ce dernier chapitre pousse àà l'extrêême l'entremêêlement et la composition des penséées: il s'agit pour Deleuze de déétailler et d'expliciter la faççon qu'a Foucault de reprendre le problèème nietzschééen du déépassement de l'homme vers le "surhomme". Nietzsche, Foucault, Deleuze. Le commentaire préésent peut donc prendre plus spéécialement pour objet dans ce long texte (11 pages) ce qui lie les 3 penseurs, leurs lignes communes, les problèèmes qu'ils partagent. Deux aspects vont apparaîître fondamentaux dans notre analyse: tout d'abord, la pratique commune du déécentrement. [...]
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