Barjavel reprend souvent un même schéma narratif dans ses romans « extraordinaires » : il semble obsédé par le motif de la destruction, qui vient faire écho au contexte de l'écriture. Le XXème siècle a en effet connu une accélération fulgurante du progrès technique et de la connaissance scientifique, au point de prendre de vitesse la réflexion morale qui devrait l'accompagner. Ces changements sont si importants que les savants eux-mêmes ne parviennent pas à en prévoir les conséquences à long terme sur la vie terrestre. Les sociétés s'empressent de s'approprier ces nouveaux modes de vie qui sont –du moins à court terme- source de confort pour les populations (électricité, automobile, machines agricoles et industrielles,…).
Mais cette vision optimiste est contrebalancée par certains intellectuels, notamment dans le domaine littéraire, qui permet à des écrivains tels que Barjavel, par le biais de l'anticipation, de montrer au grand public les méfaits à venir du progrès. Certains se mettent d'ailleurs en place dès la Première Guerre Mondiale et ne cessent de s'accroître jusqu'à la création de la bombe nucléaire et son utilisation sur Hiroshima. L'aspect ambivalent d'un progrès à double tranchant est largement développé dans l'œuvre de Barjavel, et notamment dans ses romans d'anticipation.
L'auteur y met en scène une figure développée par Goethe dans son poème nommé « der Zauberlehrling », dont nous joignons texte original et traduction. L'homme apparaît en effet comme un apprenti sorcier jouant avec le progrès comme une magie qu'il ne parvient au bout du compte plus à contrôler. Il découvre un progrès qu'il considère comme positif pour lui-même et ses semblables mais qui va finalement lui échapper, avec toutes les conséquences néfastes que cela entraîne.
[...] Une découverte scientifique pouvant avoir des effets bénéfiques sur le court terme mais se révéler négative sur le long terme, seule une expérience sur la durée est capable de démontrer son versant dangereux. Dès lors, seule l'attitude de l'homme face au progrès entre en jeu. - La connaissance limitée de l'homme : celui-ci fait une mauvaise utilisation de ses découvertes car il n'a pas conscience des dangers du progrès. Il ne parvient pas à anticiper les conséquences néfastes qui en découleront. La responsabilité humaine est ici dégagée au profit d'une imperfection inhérente à l'homme qui peut commettre des erreurs. [...]
[...] Notre monde, comme le leur, est toujours en proie à la guerre et aux armes de destruction massive : rien ne changerait donc réellement. - La destruction du monde ancien est due à la nature vindicative de l'homme, toujours en quête de nouveaux territoires et de nouvelles richesses. Il nous faudra à ce propos faire une comparaison plus précise des deux nations Gondawa et Enisorai afin de déterminer la responsabilité de l'une ou de l'autre, la première représentant a priori un peuple contrôlé et artificiel (véritable gestion des naissances) et l'autre un peuple plus proche de la nature semble-t- il. [...]
[...] Enfin, deux types de savants sont à distinguer même s'ils tendent finalement à se rejoindre. Simon, en tant que médecin amoureux de sa patiente, représente une science au visage humain tandis que le reste de l'équipe, qui considère Elea comme un objet d'étude et non comme une personne à part entière, fait partie d'une science déshumanisée. Mais au contact les uns des autres, et surtout face au récit tragique d'Elea, la pitié parvient à saisir certains d'entre eux (cf. Leonova). [...]
[...] Malgré son savoir, il éprouve une sensation d'impuissance face à la machine qui régule et contrôle l'ensemble de la vie citadine. Cette vision s'oppose pourtant au mode de vie parisien, facilité par nombre d'inventions (cf. description de Paris) comme les conduites de lait qui suppléent à celle de l'eau, les moyens de transport, etc. Mais François a justement cette vie en horreur et n'aspire qu'à retourner dans le Sud de la France, qui constitue désormais la campagne française. Celui-ci, page 83, engage une réflexion sur les conséquences néfastes du progrès et la responsabilité des hommes face à la nature. [...]
[...] Ici entre en jeu l'égoïsme de l'homme qui ne voit que son propre intérêt et non le bien commun de ses contemporains ou pire, le bien des générations futures. L'homme étant avant tout hic et nunc il cherche avant tout à s'éviter peines et souffrances, sans parvenir à dépasser sa propre finitude humaine, qui le conduirait à éprouver de l'empathie pour ses descendants. Il cherche avant tout son propre bonheur, quitte à ce que celui-ci se fasse au détriment des autres. [...]
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