Peintre avant de se consacrer à la philosophie, Arthur C. Danto nous livre ici « une philosophie de l'art ». C'est le sous-titre de La Transfiguration du Banal, publié en 1981 aux Etats-Unis (titre original : The transfiguration of the Commonplace) et en 1989 en France. Dans la préface qu'il réalise pour l'édition française, Jean-Marie Schaeffer propose de reformuler ce sous-titre en le précisant davantage : « Une philosophie analytique de l'art ». En effet, le philosophe américain aurait pu reprendre ici l'intitulé de ses ouvrages précédents : Analytical Philosophy of History et Analytical Philosophy of Action, publiés respectivement en 1965 et 1973. La philosophie analytique s'oppose à la philosophie substantialiste en ce qu'elle s'attache aux méthodes, à la manière de voir les choses, plutôt qu'aux choses elles-mêmes. Dans la lignée des deux livres dont on a parlé, c'est donc ici le type de philosophie proposée par Danto.
L'art moderne et avant-gardiste a donné jour (et encore aujourd'hui) à des œuvres d'art qui matériellement sont en tout point identiques à des objets de la vie commune, qui eux ne sont pas considérés comme des œuvres d'art. Par exemple l'urinoir exposé par Duchamp a acquis le statut d'œuvre d'art, contrairement aux autres urinoirs de la même fabrication qui en sont pourtant autant de répliques totalement semblables. On peut alors se poser la question de savoir « pourquoi cet urinoir-là ? ». C'est ce que fait Danto dans La Transfiguration du Banal, où il élargit le problème à l'art en général et est amené à considérer la spécificité d'une œuvre autrement que par une approche perceptive. Sa réflexion passe par l'analyse d'exemples fictifs, qui permettent de mieux comprendre le problème, et finalement d'arriver à une définition de l'art.
[...] Pourquoi peut-on dire que le premier de ces objets est une œuvre tandis que le deuxième n'est qu'un article de journal normal, donc un objet non artistique ? Danto affirme que M., par le choix de son mode de représentation, son choix d'écrire à la manière d'un journaliste est à propos de quelque chose, car l'artiste met en avant un choix en se servant de cette forme alors que le journaliste ne l'utilise que parce que c'est de cette façon qu'on écrit un article de journal. [...]
[...] C'est la question de l'imbrication de l'art et de la philosophie qui va être étudiée ici. Le problème de la définition de l'art est posé : Danto cite Wittgenstein, puis Kennick : Là où il n'y a pas de mystère, on n'a pas besoin de le lever et il n'y a certainement pas lieu d'en inventer un Selon ce dernier un individu serait capable de reconnaître de manière intuitive ce qui est une œuvre d'art ou ce qui ne l'est pas. [...]
[...] La relation à l'auteur semble donc être un point intéressant à étudier. Cependant, dans l'exemple précédent on parlait de deux œuvres d'art, il faudrait maintenant voir si ce critère peut être appliqué pour distinguer une œuvre d'art d'un objet commun. Pour cela, Danto a une nouvelle fois recours à une œuvre de son invention : Cravate ; une cravate que Picasso aurait peinte en bleue, en prenant soin de rendre la peinture la plus lisse possible. Cravate est une œuvre d'art, tandis que la cravate qu'une petite fille a volée à son père puis peinte, en étalant bien la peinture avec ses mains n'en est pas une. [...]
[...] sont chacun chargés de réaliser pour un institut scientifique une toile au sujet de deux des lois de Newton (J. prendra la première et K. prendra la troisième). Les deux artistes travaillent chacun dans leur coin, mais lorsque les œuvres sont terminées, elles se trouvent être absolument indiscernables visuellement (une ligne horizontale sépare la toile en deux). Si on ne peut pas dire qu'il s'agit de la même œuvre, on serait tenté d'attribuer à ces deux œuvres les mêmes qualités esthétiques. Cependant, celle de J. rencontre un vif succès là où K. [...]
[...] C'est le problème plus général du caractère mimétique de l'art qui est posé ici. Il est exposé à travers le dilemme d'Euripide. (En passant on peut noter l'opinion de Danto au sujet de la théorie institutionnaliste de l'art : elle ne tient pas compte des qualités intrinsèques de l'œuvre, une œuvre ne pourrait donc être considérée comme telle qu'en vertu d'un décret. Cette théorie conduit au constat d'une impossibilité de définir l'art puisque les entités appartenant à cet ensemble n'y seraient ajoutées que de façon arbitraire. [...]
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