Le concept de Dieu après Auschwitz est un essai d'Hans Jonas (1903-1993) historien et philosophe allemand, élève d'Husserl et d'Heidegger. Contemporain de ce qu'il appelle lui-même l'évènement Auschwitz, Jonas bien qu'exilé en Palestine dès 1933, souffre directement des exactions nazis, sa mère décédant dans le camp d'Auschwitz. Cet ouvrage de Jonas s'inscrit dans la logique de ses travaux précédents sur la place de l'éthique dans l'époque technicisée et sur la responsabilité de l'homme.
L'ouvrage de Jonas s'inscrit dans la tradition de la théodicée, c'est-à-dire la tentative d'explication de la contradiction entre l'existence du mal et la bonté de Dieu. Si Jonas décrit son texte comme une « théologie purement spéculative », c'est parce qu'il élude la question de l'existence de Dieu. L'auteur affirme ainsi que «travailler sur le concept de Dieu est […] possible même s'il n'y a pas de preuve de Dieu ».
[...] Le concept de toute- puissance s'abolit lui-même. La puissance se conçoit comme un concept relationnel, ainsi une puissance sans résistance est une non-puissance. La puissance ne peut s'exercer que sur quelque chose ayant puissance. Par référence à la physique (analogie avec les forces et forces contraires), Jonas définit la puissance comme une capacité à vaincre quelque chose En conséquence, lors du processus de création, pour que puisse s'exercer la puissance divine, Dieu a été contraint à une distribution de puissance. [...]
[...] L'intérêt majeur de l'ouvrage réside dans la démonstration de l'impossibilité de la toute-puissance. Si on élargit la réflexion de Jonas au champ politique, cette démonstration prend une valeur tout à fait pertinente dans l'étude des régimes politiques. Jonas théorise, sans le vouloir, la nécessité d'une autre source de puissance pour le maintien d'un régime au pouvoir. Un pouvoir politique qui empêcherait l'avènement d'un autre pouvoir civil, ne pourrait en rien prétendre à un quelconque pouvoir. Un régime qui se veut tout puissant est en faite un régime sans puissance, puisque sans relation à la société, étant donné qu'en dehors de lui, rien ne peut exister. [...]
[...] Le monde est ainsi conçu comme une négation divine par laquelle Dieu se donne au monde. Il est alors du devoir de l'homme d'empêcher que Dieu puisse regretter d'avoir laissé devenir le monde Jonas reprend alors l'idée selon laquelle ce sont les hommes qui peuvent aider Dieu (il se réfère entre autre au journal d'Etty Hillesum[9]). L'auteur mentionne cependant que le divin, malgré la difficulté des hommes à comprendre et à faire de même, peut apurer le bilan d'une génération et [ ] sauver la paix du Royaume invisible L'auteur échappe ainsi à une vision fataliste où Auschwitz ayant plongé le monde dans l'horreur, aurait réussi à anéantir le divin. [...]
[...] Cf. Le Gai savoir Platon, Timée. Leibniz, Essai de théodicée Voltaire, Candide Voltaire, Poème sur le désastre de Lisbonne Cf. Isaac Louria Jeune hollandaise décédée au camp d'Auschwitz en 1943 Seurat Michel, L'Etat de barbarie, collection Esprit, Seuil, Evreux p. [...]
[...] Ici s'actualise la traditionnelle opposition ontologique qui affirme la supériorité de l'être sur le devenir (tradition hellénistique). Pour Jonas, Dieu ne peut se penser qu'en devenir, car il est constamment affecté, altéré par ce qui se passe dans le monde. À nouveau Jonas explique que la création doit être pensée comme le changement décisif de l'état divin, inaugurant une relation permanente au créé. Comme développé dans l'exposé du mythe, Dieu se temporalise, l'expérience divine est corrélée au devenir progressif de la personne de Dieu. [...]
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