D'emblée, le Traité théologico-politique de Spinoza se présente comme un écrit critique et philosophique majeur, à l'instar du De Cive de Hobbes parut quelques années plus tôt, à une époque où la Religion occupe une place prépondérante, et qui plus est dans une Europe au lointain héritage biblique. « Le Livre » constitue à ce titre la matière fondamentale de l'étude proposée par Spinoza.
Ces notions, savamment réunies dans le néologisme « théologico-politique », sont donc à entendre séparément et à confronter, afin de mieux les étudier et d'en connaître les modalités respectives. À ce titre, et au regard de l'œuvre, le présent exposé se propose d'interroger les concepts théologique et politique pour savoir comment ils s'articulent entre eux, comment ils sont en relation et comment ils peuvent ou doivent être conciliés pour qu'il y ait dans l'État une stabilité et entre les hommes une concorde ?
[...] Fort d'une grande expérience de la Bible, Spinoza étudie de manière très précise les faits qui y sont présentés afin de montrer les relations entre ces deux concepts, fondamentalement différents. Cette étude nous permet de mettre en évidence ce fait que la Théologie, science des saintes Ecritures, a véritablement un rôle d'instrument politique. En effet, Spinoza pose le problème de l'interprétation de celles-ci, du détournement de leur signification, des inventions des commentateurs, ce qui le conduit à dire que de la Bible la plupart des gens ont une connaissance très imparfaite. [...]
[...] Par cela on voit comment la Théologie est utile à l'Etat. Cependant pour concilier Théologie et Politique, il faut avant tout que le droit de régler les choses sacrées appartienne au souverain, détenteur du pouvoir civil, et qu'il en soit l'interprète et le défenseur. Cela est dicté par la Raison même car “Dieu n'a pas de règne singulier parmi les hommes, sinon par ceux qui sont les détenteurs du pouvoir dans l'Etat.” (Chapitre XIX, p.316). En effet, cela se montre aisément car Dieu n'est pas à concevoir comme un législateur ou un prince ordonnant aux hommes et leur dictant des lois, il ne peut ainsi donner “force de commandement” à ces enseignements que par l'intermédiaire de ceux qui détiennent le pouvoir afin qu'ils les décrètent comme “commandements” et les légitiment. [...]
[...] Ainsi, l'Ecriture présente un certain nombre d'enseignements très simple, ce qui va de pair avec l'utilisation d'un style imagé, notamment grâce aux Miracles (Chapitre et d'une manière générale phrases et du style plus propre à émouvoir l'âme de la foule” (Chapitre XIII, p.230), c'est-à-dire adapté à la compréhension des esprits les moins éveillés, la fin étant de rendre les hommes obéissants. Nous verrons par la suite quels sont ces enseignements et comment ils sont utiles pour la conservation et la stabilité de l'Etat de même que pour la concorde entre les hommes. Ces enseignements sont en fait la quintessence, la “substantifique moelle” de toute l'Ecriture. Elle enseigne qu'il existe un Dieu, Tout- Puissant qui aime au plus haut point la Charité et la Justice et qu'il faut adorer pour être sauvé. [...]
[...] Ils ont pu constituer un dogme et demander, au nom de Dieu à ce que tous le respectent. Spinoza expose ce problème que religion a consisté pour le vulgaire à rendre aux pasteurs les plus grands honneurs.” (Préface, p.23) ce qui signifie que les Ecritures ont accru le pouvoir de certains puisqu'ils avaient le monopole d'interprétation des textes et qu'ils pouvaient ainsi revendiquer leurs actions directement de Dieu. Il était tout à fait possible pour eux “d'abriter leurs inventions sous l'autorité de l'Ecriture”. [...]
[...] En effet, le constat que la Théologie est un instrument politique car est utilisée à des fins de domination des hommes par quelques-uns que sont les théologiens, a constitué notre premier argument. Posant le problème de l'obéissance qu'elle exige et de la dévotion qu'elle inspire, il nous a semblé que c'est dans l'abus de son Autorité intrinsèque qu'a consisté la faute des théologiens. La jouissance du pouvoir d'un pouvoir supérieur, leur a assuré une domination spirituelle des hommes et les a rendu assez puissants pour juger de la fidélité ou de l'infédilté des hommes sur leur soumission aux dogmes dont ils sont à l'origine. [...]
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