(1) Le manuel a été rédigé par Arrien de Nicomédie, l'un des auditeurs et admirateurs de l'enseignement d'Épictète. C'était un enfant de famille de sénateur, qui a été ensuite proconsul, consul et général. Mais comme il n'était pas rare à l'époque, il a essayé de mettre en adéquation ses charges politiques et une doctrine philosophique, le stoïcisme, transmis par Épictète. Le manuel, ne retient pas l'activité scolaire qui consistait en des analyses de textes des anciens stoïciens. Arrien ne retient que les discussions libres, qui suivaient l'enseignement scolaire, et où l'auditoire s'adressait librement à Épictète qui répondait. Le manuel est le résumé des Entretiens, un ouvrage plus important. Le mot "manuel" traduit le mot grec "Encheiridion" qui signifie "poignard", c'est-à-dire un objet qu'on tient toujours prêt sous la main. Cela correspond à une pratique usuelle dans les écoles philosophiques de l'antiquité où il s'agissait de méditer sans cesse et en situation les enseignements clefs de l'école afin de parvenir à les intérioriser et d'en faire des attitudes devenant, par entraînement, spontanées.
(2) Plan : thèmes fondamentaux.
Premier thème : la distinction radicale, qui sera reprise tout au long des différents chapitres, distinction entre ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous.
Deuxième thème : l'idée selon laquelle ce sont nos représentations, nos jugements, nos assentiments, en un mot ce qu'Épictète appelle l'usage des représentations (chapitre VI), qui détermine nos désirs et nos tendances à agir. On notera qu'Arrien avait énoncé aussi ces principes dans le premier chapitre du premier livre de ses Entretiens, parce qu'il les considérait certainement comme représentant le fondement de l'enseignement d'Épictète (...)
[...] Quatrième et dernier thème : les conseils spéciaux aux destinataires du Manuel, c'est-à-dire aux progressants. Grâce à l'entrelacement de ces quatre thèmes, de ces quatre fils conducteurs, le Manuel s'ordonne selon le plan suivant. Les chapitres I et II du Manuel tendent surtout à montrer l'importance de la distinction entre ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous. La distinction de ce qui dépend de nous et de ce qui n'en dépend pas, semble une nouveauté de présentation par rapport aux dogmes de l'ancien stoïcisme. [...]
[...] Si, malgré tout, ton devoir te commande d'insister, vas-y et montre-toi à la hauteur des circonstances ; mais ne te dis jamais : "Le jeu n'en valait pas la chandelle." C'est une réflexion vulgaire et d'un esprit esclave des choses extérieures. Au cours de la conversation, abstiens-toi de t'étendre sur tes actions passées, sur les risques que tu as pris : car s'il t'est doux de te remémorer les dangers que tu as courus, le récit de tes aventures n'a pas les mêmes charmes pour les autres. [...]
[...] En effet, ce qui compte c'est de faire le meilleur usage de ses facultés au service de cette nature divine dans lequel chacun a vocation de s'insérer. Mal évaluer ses aptitudes, c'est se condamner à ne pas faire les tâches plus modestes où l'on avait tout pour réussir. Une petite métaphore très concrète pour s'appuyer sur des attitudes déjà connues des auditeurs en les invitant simplement à transposer ses attitudes dans de nouveaux domaines. Encore un conseil pratique lié à la vertu de tempérance. [...]
[...] Mais si tu veux atteindre l'objet de tes désirs, tu le peux. Exerce-toi à ce qui est en ton pouvoir. Tout homme a pour maître celui qui peut lui apporter ou lui soustraire ce qu'il désire ou ce qu'il craint. Que ceux qui veulent être libres s'abstiennent donc de vouloir ce qui ne dépend pas d'eux seuls : sinon, inévitablement, ils seront esclaves. XV Souviens-toi de te comporter comme dans un adopter, car les métaphores portent sur des situations typiques de l'époque que les auditeurs et les lecteurs ont pu expérimenter de l'intérieur. [...]
[...] Regarde tes biceps, tes cuisses, tes reins. Nous ne sommes pas tous doués pour les mêmes choses. Crois-tu, en te mettant à la philosophie, que tu pourras boire et manger comme à présent, céder à tes désirs et te laisser emporter par la colère comme à présent ? Il te faudra veiller, souffrir, quitter tes proches, endurer le mépris d'un petit esclave, être tourné en dérision par les passants et, toujours, avoir le dessous, qu'il s'agisse d'honneurs officiels, du pouvoir, de procès, ou d'autres affaires de même farine. [...]
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