Le scientisme du XIXe siècle s'est illusionné en affirmant que la science pourrait répondre, prochainement, à toutes les questions, et remplacerait avantageusement tous les autres discours; il est désormais abandonné par les scientifiques eux-mêmes. Existe-t-il donc des questions qui échappent à l'approche scientifique ? Si l'on caractérise cette dernière par la recherche des lois, les questions métaphysiques - dont les « objets » ne sont ni expérimentables, ni répétables - sont bien extérieures à la science, et elles peuvent trouver des réponses dans la croyance religieuse. Cette "cohabitation" de la science et de la croyance peut sans doute être conflictuelle, mais il appartient à un point de vue rationnel d'introduire de la rigueur jusque dans la croyance.
[...] Du même coup, elle change les questions auxquelles elle tente de répondre. L'esprit doit s'habituer à une évolution (dialectique selon Bachelard) des connaissances, alors même que les questions qui le préoccupent peut-être le plus restent sans réponse scientifique. Dans un tel contexte, les réponses religieuses apparaissent autrement rassurantes : elles ne changent jamais, les dogmes ne risquent pas d'être corrigés, la morale d'inspiration religieuse a réponse à tout, etc. Face à la variabilité du savoir scientifique, la mentalité religieuse affirme une stabilité qui peut toujours séduire les esprits en quête de certitudes définitives. [...]
[...] La métaphysique peut-elle être autre chose qu'un champ de ruines» Kant, à son tour, conteste la validité de tous les arguments qui ont cherché à démontrer l'existence de Dieu. Ce dernier est un des trois concepts constituant à ses yeux la métaphysique, avec la liberté et l'âme. Or, la métaphysique n'est pas connaissable au sens strict. Son histoire même l'enseigne, qui n'est qu'un champ de ruines dans la mesure où l'esprit, sans garde-fou, peut y promouvoir les affirmations les plus arbitraires et contradictoires. [...]
[...] [II - Aucune science ne peut aborder les questions concernant les causes premières ou finales [A. Les questions possibles pour l'esprit excèdent le point de vue scientifique] Se demander comment un phénomène se produit, c'est chercher à déceler sa cause proche. Se demander pourquoi ou pour quoi il se produit, c'est s'interroger sur sa raison d'être, ou sur sa fin, sa signification ou sa valeur. De telles interrogations sont aussi actuelles qu'anciennes, et le développement de la mentalité scientifique ne peut les supprimer purement et simplement, parce qu'elles témoignent d'une inquiétude ou d'une quête de sens qui semble caractériser l'esprit humain - quelle que soit d'ailleurs la société dans laquelle il se développe. [...]
[...] La religion répond à des questions dont la science ne peut se charger] Pourquoi l'univers existe-t-il ? La science parviendra peut-être à expliquer comment l'univers s'est constitué, mais les théories physiques ne s'intéressent pas au pourquoi de cette constitution - encore moins, si l'on peut dire, à son pour quoi - qui renvoie à une cause antérieure à toutes les causes compréhensibles, sinon à une intention ou à un projet. Les discours religieux, non soumis aux mêmes exigences rationnelles, sont au contraire très capables de répondre. [...]
[...] Relativement aux ambitions antérieures, l'esprit scientifique est modeste, puisqu'au lieu de vouloir expliquer le tout en recourant à des principes spirituels (intentions ou volontés, éventuellement de la nature elle-même), il rend compte des phénomènes par des causes qui sont du même niveau de réalité. [B. La science questionne des phénomènes généraux] Il n'y a de science disait déjà Aristote, que du général La formule conserve sa validité, pourvu que l'on comprenne que ce général désigne des phénomènes obéissant à des lois formulant des relations constantes. La science questionne ainsi, du réel, les aspects réguliers. Par principe, elle ne s'intéresse pas à ce qui serait unique ou exceptionnel: une loi scientifique ne peut admettre d'exception. Elle participe d'une rationalité synonyme d'universalité. [...]
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