Au travers de la Correspondance de Paul Cézanne, on peut être amené à lire cette affirmation qu'il fit à Émile Bernard : « Je vous dois la vérité en peinture, et je vous la dirai ». Mis à part l'investissement du peintre dans la recherche de la vérité, il s'agit de remarquer ici comment il compte la transcrire. S'il semble d'abord qu'il y ait eu confusion entre le fait de dire et l'acte de peindre, on réalise rapidement que Cézanne a rapproché les deux termes de manière tout à fait intentionnelle. Aussi, que cherchait-il à dire, et dans quelle mesure la production artistique du peintre peut-elle être considérée comme une parole ? Le moyen d'expression du peintre semble bien ici appartenir au langage, quand bien même il ne prononce aucun mot. Pourtant, dans son sens strict, le langage est, plus qu'une faculté, cette dimension fondamentale du comportement humain ayant pour fonction l'expression et la communication, mais à travers une langue, c'est-à-dire un système d'expression verbal comportant un vocabulaire et une grammaire définis. Dès lors, comment l'art, qui réunit les productions d'œuvres par des êtres conscients sous un caractère commun, peut-il s'approprier le langage ?
[...] En ce sens, seul l'humain s'élève donc au langage. La particularité du langage humain, c'est le fait qu'il repose sur une langue, soit sur un système de signes, dans lequel les signes n'ont de sens que dans la différence qui les met en relation les uns avec les autres. C'est ce que Saussure met en évidence dans son Cour de linguistique générale, dans lequel il étudie la langue de manière synchronique (et non plus diachronique), opérant ainsi une rupture dans l'histoire linguistique. [...]
[...] Il répond donc au monde et s'efface derrière lui pour que les choses apparaissent. Il a conscience de sa responsabilité de voir le monde et de nous rappeler que nous sommes des êtres poétiques par définition. Ainsi lorsque Rimbaud, dans les Illuminations, dit Il y a une horloge qui ne sonne pas il nous rappelle qu'il y a des choses. Tout l'enjeu de ce vers est dans cet il y a : dans il y a il y a le monde, à ne pas oublier. [...]
[...] Dans le chapitre IV de cette œuvre, quand y a-t-il art ? on cherche une explication au fonctionnement de l'œuvre d'art plus qu'à la définir. Il s'agit avec l'auteur d'intégrer la compréhension du phénomène artistique dans une théorie des symboles. C'est cette théorie, ces symboles, qui créent le système de signes constituant le langage de l'art dont on parle ici. Aux côtés de Goodman, on distingue 5 symptômes indicatifs. Il est important de noter qu'ils ne sont pas tous obligatoires, mais qu'il doit en revanche surgir, sinon tous, quelques-uns de ces symptômes dans une œuvre. [...]
[...] Ainsi l'art est un langage de pouvoir. Mais si avec Heidegger on a détaillé comment le langage artistique ouvre l'être à l'étant, c'est-à-dire l'homme à son devoir fondamental de donner sens aux choses, comment ce pouvoir se développe-t-il ? Et y a-t-il des limites à ce pouvoir du langage ? Malraux, dans les Voix du silence, nous donne une première piste quant au dévoilement des choses par l'artiste. Il affirme que le peintre, par le jeu des couleurs, fait naître une chose, un paysage que les préoccupations humaines cachent d'ordinaire. [...]
[...] L'unité de la peinture, de l'art en général, ne fait qu'illustrer l'universalité du geste humain, quelque différentes que soient les cultures, d'inaugurer un sens, de fonder une tradition. L'art parle donc à sa façon, d'une façon essentielle et pertinente. Et la peinture ou la sculpture ne sont pas des langages visuels qui désigneraient directement les choses que les mots nommeraient. Bien au contraire l'art, quel qu'il soit, est un langage parce qu'il parvient, indirectement, tacitement, à une signification, à un sens. [...]
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