Si je réfléchis à ma liberté, je ne me dis pas 'j'en suis au degré 1, 2 ou 3', ou 'ça y est, j'ai fait des efforts, ma liberté a atteint le degré 4'. Le terme de 'degré' semble gênant. Si on répond oui à la question 'y a-t-il des degrés de liberté?', cela veut dire qu'on considère la liberté comme processus, comme mouvement ascendant avec des réussites marquées par des degrés : on est de plus en plus libre si on atteint un degré de plus en plus élevé. Plus la température est haute, plus on est libre.
Dire qu'il y a des degrés de la liberté, c'est donc définir d'une certaine manière la liberté. Ce qui est en jeu avec cette question, c'est la définition de la liberté, définition non seulement théorique mais aussi pratique : est-ce que dans les faits on est libre, on devient libre par degrés ? Ici nous allons donc réfléchir sur le mouvement de la liberté : est-ce que la liberté est donnée ou processus, et s'il s'agit d'un processus, de quel processus s'agit-il ?
On verra que ce processus dépend de la définition donnée au mot polysémique liberté. Nous verrons que si on considère la liberté comme absolue, le terme de degré est impropre ; mais que si l'on pense la liberté comme pouvoir, il y a bien des degrés dans notre puissance d'agir ; enfin on essaiera d'étudier de plus près le mouvement de ce conatus, qui n'est pas seulement mouvement de la liberté mais mouvement de libération.
[...] Il est encore nécessaire d'admettre, pour les expliquer, une causalité par liberté. : cette thèse affirme que l'homme est libre, qu'il y a une spontanéité qui consiste à commencer une série de phénomènes, commencement absolu quant à la causalité : il s'agit bien d'une liberté transcendantale, d'une liberté absolue. Et si on contraire, on suit l'antithèse qui affirme qu' il n'y a pas de liberté, mais que dans le monde tout arrive suivant les lois de la nature on dit ici que l'homme est absolument déterminé : on ne voit donc vraiment pas comment il pourrait y avoir des degrés de liberté, puisque même si l'homme peut être considéré de deux façons, on peut et doit penser l'homme comme noumène, donc absolument libre, comme cause absolument libre de ses actes, ou on peut l'expliquer scientifiquement comme phénomène parmi les phénomènes, il s'agit d'absolu : cette thèse et cette antithèse sont toutes deux absolues, l'homme est absolument libre ou absolument déterminé : elles n'admettent pas de degré parce qu'elles n'admettent pas de limite, de plus ou moins. [...]
[...] En effet qu'est- ce qu'un degré ? Il s'agit bien d'un niveau atteint en intensité ou en importance, or dans le libre-arbitre mon choix est absolument libre, je ne peux pas lorsque je choisis dire qu'à la fois mon choix vient de ma volonté singulière, libre, mais qu'il est aussi un peu déterminé par mon éducation. Je ne peux pas par exemple dire à la fois que certes, j'ai volé donc j'ai choisi de voler, mais en même temps, c'est à cause de ma détermination, de mon éducation, de mon milieu : donc j'étais un peu libre, mais pas tout à fait, j'étais libre à un petit degré. [...]
[...] L'ONU également succède à la SGM, mais aussi à l'échec de la SDN, jugée insuffisante, et la Déclaration universelle des droits de l'homme succède à Auschwitz. La liberté politique n'est pas donnée, elle est à conquérir, il y a libération politique et on ne peut nier qu'il y ait, plutôt que des degrés, des étapes qui ont été franchies, des marques d'une progression de la liberté. [...]
[...] Je ne suis pas libre. Or, je puis me libérer de ces passions, je puis devenir de plus en plus libre par la raison, en m'efforçant de me débarrasser des passions qui provoquent de la tristesse, donc qui diminuent ma puissance d'agir, par la raison en comprenant ce sentiment, en le séparant de la pensée d'une cause extérieure, en suivant les préceptes de la raison. Plus le pouvoir de ma raison est grand, plus je suis libre : il y a donc bien des degrés de liberté, car le pouvoir de la raison peut devenir de plus en plus grand : je suis totalement passif/ je suis de plus en plus actif/ et pour Spinoza je suis complètement libre par l'amour intellectuel de Dieu. [...]
[...] C'est la puissance d'agir qui est liberté. Cette puissance d'agir est plus ou moins forte, elle a donc un degré plus ou moins haut. Nous nous efforçons tous de persévérer dans notre être (c'est le conatus). Il s'agit d'être moins affecté par les passions, qui diminuent la puissance d'agir, d'augmenter notre puissance d'agir en échappant aux passions par une connaissance rationnelle des affections. Il y a donc des degrés de liberté : plus je suis en proie aux passions, moins je suis libre, plus je vis sous la conduite de la raison, plus je suis libre. [...]
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