D'où viennent les nations ?

Résumé du document

La nation comporte deux fonctions essentielles : d'une part, une fonction d'intégration. En effet, elle permet au groupe de résister aux divisions qui pourraient le déchirer. D'autre part, elle dispose d'une fonction disciplinaire : en sacralisant le pouvoir, fait de sa force une autorité. Chercher l'origine de la nation, c'est chercher le moment d'éclosion de l'idée, le moment de la construction nationale. On va donc s'intéresser à ce qui a pu inspirer le discours nationaliste

Extraits

[...] Cette vision met bien en valeur également l'attrait du nationalisme pour les masses. Cette vision présente l'avantage d'offrir une meilleure reconnaissance de l'ambivalence politique du nationalisme. Cf. Michael Mann : le nationalisme modéré est le produit d'une tendance vers la démocratie. Le nationalisme agressif en est une forme dérivée Même si cette vision souligne le côté démocratique et idéaliste, elle ne cache pas ses côtés sombres. Par ailleurs, elle rend mieux compte que la vision culturelle des relations entre politique et culture : aux Etats Unis, il n'existait pas d'opposition sérieuse au moment de l'indépendance, ce qui a permis une compréhension plutôt lâche de l'unité nationale. [...]

[...] Il faut lutter contre les particularismes, réduire les dissidences, supprimer les germes d'antagonismes internes. Ce qui implique que tout nationalisme penche vers l'établissement d'un certain totalitarisme moral et idéologique : il ne supporte la pluralité des fidélités ou des appartenances que lorsque celle-ci s'harmonise avec les institutions et les principes admis par tous comme fondant l'unité nationale - passé historique : la prise de conscience nationaliste est aussi une prise de conscience des valeurs léguées par l'histoire. C'est à partir de la revendication à l'autonomie d'une culture héritée d'un long et glorieux passé que les théoriciens des mouvements nationalistes du siècle dernier se sont efforcés de légitimer la revendication de l'indépendance nationale. [...]

[...] Le nationalisme élève la culture du statut de servante de la politique du pouvoir à une autonomie. - Le nationalisme donne une chance aux groupes historiquement opprimés ou faibles de gagner autonomie, unité et identité grâce à une solidarité culturelle. Cette théorie, en faisant le lien entre nationalisme et sentiment populaire, permet de comprendre ce qui a permis au discours nationaliste d'être un discours clé dans l'ère contemporaine. Un appel à des liens pré-politiques est en effet plus mobilisateur que celui fait à des principes politiques abstraits. [...]

[...] Le moyen est l'éducation. Mais Rousseau s'arrête là, il ne prône pas de gouvernement spécifique, soit parce qu'une période de réforme est une période de troubles, soit pour ne pas vexer les commanditaires de sa réflexion. En les invitant à rétablir des coutumes anciennes, et à en introduire de nouvelles qui seraient purement polonaises, il insiste sur le fait que la justice de ces moeurs était bien moins importantes que leur effectivité à constituer une identité défensive solidaire. Il existe néanmoins une différence entre Machiavel et Rousseau sur ce qui sera le fondement du discours nationaliste: alors que Machiavel prône une stratégie offensive et expansionniste, Rousseau défend l'idée d'une construction de la nation de manière défensive, presque sur un modèle autarcique (est-ce par prudence en raison du cas particulier qui lui est soumis, et de la faiblesse de la Pologne ? [...]

[...] Une identité continue entre gouvernants et gouvernés 1. Un discours constitutif et géopolitique Erica Banner- dans un article paru dans Nations and Nationalism en 2001- propose un noyau constitutif de tous les discours nationalistes qui s'énoncerait ainsi : il faut promouvoir ou préserver une forte identité continue entre gouvernants et gouvernés, et au sein des différents groupes de gouvernés : - Le terme d'identité se réfère à une demande de loyauté, d'allégeance ou de devoir envers le pays, ou le gouvernant : il s'agit d'un appel à une prise de conscience, plutôt qu'un vague sentiment, du fait d'être identique, d'un nous. [...]