L'arrivée de Pandore – envoyée sur terre par les dieux munie d'une jarre contenant tous les malheurs humains pour punir les mortels d'avoir eu accès à la flamme divine – marque la fin de l'âge d'or, un temps où les hommes et les dieux vivaient en parfaite harmonie. Les bergers d'Arcadie vivaient dans un bonheur complet, parfait: avant Pandore, la vie était belle.
La vie renvoie à la sphère des hommes, et peut être définie comme l'évolution du monde des vivants, l'ensemble des évènements qui marquent l'humanité. Il est donc à première vue étonnant d'associer la vie à la beauté, qui renvoie elle à une sphère extérieure au vivant, transcendante, du fait qu'elle est parfaite quand l'homme n'est que perfectible. Ainsi, si la vie se réduit à la beauté, si « la vie est belle », alors la beauté relève du monde des mortels, et ne peut être parfaite, singulière : si la vie est belle, la beauté ne l'est pas! Inversement, si la beauté est absente de la vie, alors l'homme ne peut aspirer à la perfection du fait qu'elle lui est inconnue; l'homme n'est plus perfectible et la vie est réduite à une permanente médiocrité, dont l'homme ne peut s'extraire.
Comment penser alors un lien - apparemment impossible et pourtant nécessaire - entre l'homme et la beauté ? La vie peut-elle - voire doit-elle - être belle ?
[...] Chez Platon, les hommes qui se contentent des belles choses ne peuvent accéder au monde des idées parfaites, de la vérité, de la beauté à l'état pur. Ainsi, l'illusion d'une belle vie s'avère dangereuse pour l'homme, et le condamne fatalement à la déception dans La recherche du temps perdu, le narrateur est sans cesse déçu par sa projection de la beauté dans la réalité, comme l'illustre l'épisode de la Birma, célèbre actrice qui incarne la beauté dans l'esprit du narrateur, terriblement déçu quand il a l'occasion de la voir pour de vrai au théâtre. Si la vie est belle, alors la beauté n'existe pas ! [...]
[...] Ainsi, ne faudrait-il pas plutôt dire la vie était belle? La vie humaine durant l'âge d'or antique était belle justement parce qu'une fois Pandore venue, elle ne l'est plus. La beauté d'une vie serait nécessairement une beauté rétrospective, disparue. Bibliographie proposée Platon (0427?-0348? av. J.-C.) Le Banquet ou De l'Amour Platon Traduit du grec par Léon Robin et M. J. Moreau Préface de François Châtelet Année: 1973 Zima, Peter Václav (1946- . ) Le Désir du mythe : une lecture sociologique de Marcel Proust / P.-V. [...]
[...] L'homme n'a pas accès à la perfection, il ne peut donc pas y aspirer : une telle hypothèse implique alors le risque de considérer la vie comme statique, l'homme comme imperfectible. Si la vie n'est pas belle, alors ce n'est pas une vie digne d'être vécue ! Ainsi le narrateur de la recherche du temps perdu, bien qu'exprimant le désir ardent de connaitre les jeunes filles en fleurs, de pénétrer et posséder leur univers, il s'avoue déjà vaincu et qualifie son souhait d'impossible. Il n'approchera pas la beauté. Il faut alors nécessairement repenser un lien entre la beauté et la vie humaine pour garantir le principe essentiel de perfectibilité. [...]
[...] Inversement, si la beauté est absente de la vie, alors l'homme ne peut aspirer à la perfection du fait qu'elle lui est inconnue ; l'homme n'est plus perfectible et la vie est réduite à une permanente médiocrité, dont l'homme ne peut s'extraire. Comment penser alors un lien apparemment impossible et pourtant nécessaire - entre l'homme et la beauté ? La vie peut-elle -voire doit-elle - être belle? Il semble d'abord que l'homme soit aveuglé par l'illusion d'une belle vie Cependant, face à une impossible équivalence entre le monde des vivants et la beauté, l'art se pose comme moyen de réintroduire la beauté dans la vie humaine. [...]
[...] Il est donc effectivement perfectible, car incomplet et l'espoir de satisfaire son désir de beauté se pose comme moteur de son évolution. Cet espoir s'avère cependant sans cesse déçu, et c'est l'illusion du beau qui permet à l'homme de se surpasser. La vie n'est belle que dans l'imaginaire humain. Dans le Banquet de Platon, Diotime insiste sur l'acharnement avec lequel l'être humain tente de s'accrocher aux beaux objets, aux beaux corps : les hommes sont prêts à se priver de manger et de boire et se contentent de regarder leurs bien-aimés projection du beau. [...]
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