De Platon aux exercices spirituels d'Ignace De Loyola, le fondateur de l'ordre des Jésuites, la critique des passions a conduit à soutenir un idéal de la maîtrise de soi et à définir une certaine conception de la liberté. En effet, celui qui est soumis à la passion est aliéné, au sens premier du terme, il est devenu autre. Entièrement dominé par ses affects, il ne se maîtrise plus. Inversement, se rendre maître de ses passions, les extirper, c'est véritablement se rendre maître de soi, puisque le soi n'est rien d'autre que la partie proprement humaine de notre âme. Ainsi que veut dire : « se rendre maître de ses passions ? Cela signifie-t-il les détruire ou bien les dominer ? Dans un premier temps, les Stoïciens considèrent qu'il faut viser l'apathie et pour cela détruire les passions grâce à l'usage de la raison. Mais, dans un second temps, Kant nous démontre que la raison ne peut rien contre la passion et que seul le corps pourrait influencer les passions. Enfin, nous verrons que cette maîtrise n'est pas absolue car il reste toujours une part d'affectivité première et que la passion peut devenir liberté et action grâce à la connaissance des causes qui font que nous sommes passionnés
[...] Le vaincre, est-ce dominer ses désirs et en quel sens ? S'agit-il de supprimer ses désirs ou au contraire d'en modifier les fixations imaginaires ? Ainsi, par exemple, pour les Épicuriens, le sage évite l'Amour, mais pas ses plaisirs, car l'Amour est une forme de passion du pouvoir, de désir et de domination. Ainsi en pratique, en quoi consiste cette maîtrise de nos affections ? Dans la tradition Stoïcienne, cela ne présente aucune difficulté insurmontable. Nous ne sommes pas maîtres de l'ordre naturel, mais nous sommes maîtres de nos propres représentations. [...]
[...] Tout cela nous rend esclaves. Aussi, Épictète considère que la Mort n'est pas à craindre, pas plus que la souffrance ou le jugement des autres. Cependant, les raisons que nous avons de ne pas prendre ces craintes au sérieux, de les traiter comme le fruit de l'imagination malade, sont différentes. Si la crainte est une tristesse accompagnée de l'idée d'une chose future, l'on peut avoir deux attitudes opposées concernant l'avenir. Les Épicuriens soutiennent la thèse de la contingence des futurs et refusent la fatalité, ce qui nous laisse toujours la possibilité d'exercer notre liberté en vue de vivre bien et d'éviter les maux. [...]
[...] En effet, le désir relève d'un manque, si celui-ci est comblé, alors la passion s'arrête d'elle-même. [...]
[...] Par conséquent, il semble impossible de guérir de la passion (de même, pas par l'usage de la raison). Ainsi lorsqu'on parle de se rendre maître de ses passions il faut préciser que cette maîtrise relève d'une certaine domination des passions, et non pas de leur élimination et ensuite cette maîtrise n'est jamais absolue : il faut être conscient que la passion comporte une part de passivité irréductible. Aussi, il est impossible de contrer la passion par la raison, Hume nous dit qu'il faut se servir du corps. [...]
[...] Il ne faut donc pas prendre au sérieux, le discours qui accompagne la passion, donner du sens à ce qui est irréductible au sens. Les passions sont effectivement révélatrices de l'attachement de l'homme au sensible : elles lui rappellent qu'il n'est pas tout puissant et extérieur à toute détermination. Il faut donc comprendre ses affects à partir des lois générales de la causalité. Rien n'arrive sans cause, rien n'est anormal au regard de la Nature. Il suffit donc d'analyser les passions comme tout autre phénomène naturel. [...]
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