Le travail est un concept qui s'est constitué au fil des siècles suivant les sociétés, les peuples, les pays. Il est en évolution permanente, et tient aujourd'hui une place centrale dans notre monde moderne. C'est une notion protéenne puisque répondant à plusieurs définitions, tantôt dégradantes lorsqu'il est pensé par exemple par les Grecs ou bien encore dans une optique capitaliste, tantôt valorisantes lorsqu'il devient moyen d'humanisation de l'homme, mais qui est généralement définie d'une manière assez neutre _ quoique quelque peu ambiguë _ comme une « activité humaine de transformation de la nature en vue de la satisfaction des besoins sociaux ». (Grand dictionnaire de la philosophie) C'est une notion contradictoire qui suscita de nombreuses interrogations d'ordre anthropologique, ontologique, sociologique, épistémologique ou bien encore éthique et fit l'objet de nombre de débats et de lois, notamment dans le domaine de la morale, surtout depuis l'institution des droits de l'homme.
S'interroger sur le travail et la morale, c'est d'abord faire une distinction entre morale et éthique : quand bien même ces notions ont une racine semblable, l'une grecque (éthique vient du grec éthikos, moral, de éthos, mœurs) et l'autre latine (morale vient de mores, meurs), qui leur confère des sens proches, elles sont cependant à distinguer. La morale est communément l'ensemble des règles d'action, des valeurs qui fonctionnent comme normes dans une société, tandis que l'éthique est la doctrine du bonheur des hommes et des moyens d'accès à cette fin. Cette dernière ne semble pas avoir véritablement de rapport avec le travail et la morale si ce n'est d'une manière indirecte. Se questionner sur le travail et la morale, c'est se demander ce qui les relie, qu'ils entretiennent un rapport d'opposition ou un rapport logique de cause à effet ; c'est donc s'attarder ici sur la nature de la conjonction de coordination « et ».
[...] »(7ème proposition) la nature ne peut déterminer l'homme à la morale puisque la morale est autodétermination. Aussi la nature ne peut –elle faire mieux qu'utiliser le travail pour cultiver l'homme et le rapprocher du moment où il basculera_ mais de lui-même _ dans la moralité, grâce à sa seule raison, comme il le précise par ailleurs au de la Critique de la faculté de juger. Si nous pouvons constater que le travaille endosse un rôle formateur, qui éduque l'homme et l'amène au bord de la moralité, celui de régulateur au sein de la société lui est également attribué. [...]
[...] Le travail acquiert ici un rôle régulateur, normateur plus que formateur. Il s'agit, grâce au travail, de refouler, de canaliser ses pulsions. C'est ainsi que Foucauld parle du travail pénal qui est un principe d'ordre et de régularité Avec le travail, la règle s'introduit dans une prison, elle y règne sans effort, sans l'emploi d'un moyen répressif et violent. En occupant le détenu, on lui donne des habitudes d'ordre et d'obéissance. »(Surveiller et punir, p.245 _ Gallimard) Ainsi, l'on peut donc constater que la morale n'est pas quelque chose d'innée chez l'homme. [...]
[...] »(4ème proposition) Mais Kant précise que le travail ne fait que conduire l'homme au bord de la moralité ; car culture et moralité sont à la fois proches et bien distinctes. La mise à distance des penchants ne signifie pas encore leur congé. Nous sommes cultivés au plus haut degré par l'art et la science. Nous sommes civilisés, jusqu'à en être accablés, par la politesse et les bienséances sociales de toute sorte. Mais nous sommes encore loin de pouvoir nous tenir pour déjà moralisés. [...]
[...] Ce n'est pas parce qu'il y a travail qu'il y a nécessairement morale : la morale demande un travail sur soi. Les pensées antiques sont, plutôt que des systèmes spéculatifs, des sagesses à pratiquer, réclamant des exercices et des entraînements, qui correspondent à un art de vivre, c'est-à-dire à une éthique. Dès les temps les plus reculés de la Grèce homérique, l'éducation des jeunes gens est la grande préoccupation de la classe des nobles, de ceux qui possèdent l'aretê, c'est-à-dire l'excellence requise par la noblesse de sang, qui deviendra plus tard, chez les philosophes, la vertu, c'est-à-dire la noblesse de l'âme. [...]
[...] le travail est-il une valeur morale ? Pouvons- nous parler d'une conjonction du travail et de la morale ? dans un premier temps nous nous interrogerons sur ce qui oppose traditionnellement le travail et la morale ; puis nous tenterons de voir en quoi ces deux notions entretiennent un rapport logique, le travail permettant à l'homme d'accéder en partie à la morale ; enfin, nous nous pencherons sur la conjonction du travail et de la morale, an tant que l'état de moralité chez l'homme ne s'acquiert que par un travail sur soi. [...]
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