Nous faisons quotidiennement et spontanément une distinction entre ce qui relève de notre psychisme et ce qui nous semble appartenir en propre à un monde matériel. Lorsque, par exemple, nous prenons une décision qui met en branle notre corps, nous avons bien en effet l'impression que l'instance qui décide est non seulement un « quelque chose d'autre » que le corps mais, qu'en plus, cette instance agit sur notre corps. Inversement, lorsque notre corps est malade nous nous sentons affecté dans notre esprit : ce dernier pourrait donc également pâtir du premier. Ainsi sommes-nous conduits, par l'expérience quotidienne, à supposer une distinction entre l'âme et le corps et à une interaction entre les deux.
[...] Descartes évoque, pour répondre à cette objection, dans sa correspondance avec la princesse Elisabeth, l'existence de notions primitives spécifiques à l'âme et au corps pris ensemble, notions primitives qu'il distingue de celles qui, dans sa philosophie, servent à penser l'âme seule et le corps seul. Cette hypothèse, quelque peu gratuite (car comment expliciter ces notions sui generis sera naturellement considérée comme insuffisante et d'autres systèmes, tout en conservant la dualité des substances, s'efforceront de résoudre à leur manière le problème de l'union de l'âme et du corps : tels, par exemple, l'occasionnalisme de Malebranche ou l'harmonie préétablie de Leibniz. [...]
[...] Pour se donner les moyens de répondre à une telle question nous devrons analyser un certain nombre de concepts qui ont été convoqués dans la pensée philosophique pour aussi bien supposer que nier la distinction entre l'âme et le corps. Dans un premier moment nous nous intéresserons à une distinction que l'on peut concevoir en raison puis nous étudierons ce qu'il en est pour ceux qui l'ont pensée en fait Enfin, cela nous conduira à examiner deux problèmes qui se cachent derrière ces modalités de supposer la distinction de l'âme et du corps, à savoir le problème de la vie et celui de l'expérience vécue. [...]
[...] Ces observations le conduisent à poser que la vie doit se concevoir comme une propriété, un pouvoir de la matière organisée ; plus précisément, la thèse repose sur le fait que la matière vivante est constituée de fibres qui se caractérisent par leur irritabilité C'est là une position matérialiste et qui, de façon scandaleuse pour ses prédécesseurs (et certains de ses contemporains), affirme que la matière en elle-même, le pouvoir de se mouvoir, de sentir et même de penser. Pourquoi et comment de la matière peut avoir ces propriétés étonnantes, La Mettrie se soucie peu de cette question qu'il considère pour ainsi dire superflue : Je suis donc tout aussi consolé d'ignorer comment la Matière, d'inerte et simple, devient active et composée d'organes, que de ne pouvoir regarder le Soleil sans verre rouge. (L'Homme-Machine). Cette attitude où l'on délaisse le pourquoi au profit du comment annonce le positivisme. [...]
[...] Quelles que soient ces déclinaisons, il semble bien que la notion d' âme comme entité séparée ait disparu du champ d'investigation. Le problème semble tranché et, pour répondre à la question du sujet, nous n'aurions à présent plus de raisons valables de supposer l'âme comme distincte du corps Ce serait cependant aller un peu trop vite que de penser cela. En effet les théories modernes de la philosophie de l'esprit butent sur un fait tout aussi évident qu'incontestable, à savoir le problème de l'expérience vécue, ou encore le problème des qualia. [...]
[...] S'appuyant sur les outils conceptuels de sa physique, il propose alors sa définition : En conséquence, l'âme est la réalisation première d'un corps naturel qui a potentiellement la vie. II, 412a25). Comprenons : certains corps naturels (c'est-à-dire non artificiels) possèdent en puissance la vie et, cette puissance s'actualise par le concours de l'âme : cette dernière a donc le statut d'une entéléchie car elle permet un passage de la puissance à l'acte. Mais Aristote précise encore que cette entéléchie est première Donnons un exemple qui permettra de comprendre cette précision : un médecin est une personne qui possède un savoir médical mais ce médecin peut tout aussi bien être chez lui sans exercer la médecine qu'être auprès d'un malade et le soigner. [...]
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