Responsable, ignorance, inconscient, pas avoir conscience, responsabilité de ses actes, Homme, contrôle
Un être doué de conscience est, théoriquement, un être responsable, qui se reconnaît être l'auteur de ses actes et est capable d'en répondre. Mais cela veut-il dire, pour autant, que le fait de ne pas avoir conscience de quelque chose nous en déresponsabilise ? Ce dont je n'ai pas conscience peut être autant en moi qu'en dehors de moi. Pour donner un exemple, il peut arriver qu'un chirurgien qui opère son patient commette une erreur fatale pour ce dernier : est-il responsable de la mort de son patient, sachant qu'il n'avait pas conscience de commettre une erreur, et qu'il n'a pas volontairement donné la mort à son patient ? Est-ce
l'intentionnalité de son geste qui compte (et qui le déresponsabilise car il n'a pas voulu donné la mort à son patient, et bien au contraire, il a voulu le sauver) ou est-ce seulement son geste qui compte (et qui alors le responsabilise) ?
[...] On ne peut donc pas considérer quelqu'un comme non responsable de ses actes, s'il n'a pas cherché à prendre connaissance du contenu de son inconscient ; encore une fois l'homme est responsable de son ignorance Toutefois, on peut encore se demander si on doit vraiment considérer le moi comme ce que suis à la fois consciemment et inconsciemment, ou seulement comme ce que je suis consciemment, car c'est la seule partie de moi-même que je suis capable de déterminer. Doiton considérer que c'est le sujet dans son intégralité qui est responsable de ses actes, ou que c'est seulement la partie de lui-même qui lui est cachée, à savoir son inconscient ? Pour répondre à cette question, on se voit forcés d'adopter une perspective pragmatique. [...]
[...] Peut-on me tenir pour responsable de quelque chose que j'ai fait par erreur, ou bien sans le savoir ou encore sans en envisager les conséquences ? Nous allons partir d'un exemple. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les enfants nazis embrigadés dans les Jeunesses hitlériennes agissaient comme de véritables soldats et ont causé la mort injuste de nombreuses personnes. Ces enfants se rendaient compte de leurs actes, ils étaient conscients de ce qu'ils faisaient, mais ils ne se rendaient pas compte que c'était mal. [...]
[...] L'homme est donc, d'une certaine manière, responsable de ce dont il n'a pas conscience, dans la mesure où il lui appartient d'élargir son champ de conscience, déjà en cherchant à se connaître lui-même pour pouvoir réfréner ses pulsions, mais aussi dans la mesure où il est impensable qu'il ignore totalement les conséquences ou l'ampleur que peuvent prendre ses actes. Sa responsabilité sur des actes dont il n'a pas conscience s'étend donc sur tout ce qu'il est capable de contrôler d'une certaine manière. C'est d'ailleurs la perspective adoptée par la loi, pour déterminer pénalement la responsabilité de quelqu'un. [...]
[...] Au contraire, on peut considérer que l'homme est responsable de ce dont il n'a pas conscience. En effet, il ne dépend que de moi de prendre connaissance non seulement du monde qui m'entoure, afin d'être conscient des répercussions de mes actes, mais aussi de prendre connaissance de moi-même, plutôt que de me cacher derrière un caractère dont je prétends ne pas pouvoir être le maître. Cependant, il faut émettre des restrictions à cette affirmation, car sinon on risque de considérer quelqu'un comme responsable injustement. [...]
[...] Cependant, cela a ses limites. En effet, comme le dit Aristote dans Ethique à Nicomaque, l'homme qui n'a pas cherché à prendre connaissance des conséquences de ses actes, est responsable de son ignorance car il ne lui était pas difficile d'envisager les conséquences de ses actes, mais il ne l'a pas fait. Dans l'exemple précédent, il serait injuste de considérer les enfants nazis comme responsables de ce qu'ils ne pouvaient pas savoir, car leurs fautes ne résultaient pas d'un défaut de savoir, étant donné que le seul savoir auxquels ils avaient accès était celui-là même qui les poussaient à commettre leurs méfaits. [...]
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