Responsabilité, conscience, inconscience, lois, humains, société, actes, connaissance, morale, contrainte, obligation morale, théâtre social
On admet en général l'irresponsabilité d'une personne inconsciente de ses actes et on l'excuse. Cette attitude s'appuie sur le principe de ne s'interroger sur la responsabilité que lorsque la conscience des actes est engagée. La question : suffit-il d'être conscient de ses actes pour en être responsable ? demande paradoxalement d'examiner autrement le rapport qu'un sujet peut établir avec ses propres actes. Sa responsabilité relève-t-elle de la seule conscience qu'il en prend ? Une telle idée interroge la possibilité d'une autre source de responsabilité que la conscience de ses actes. Le problème posé est donc de savoir exactement ce qui nous engage dans nos actes, car ce ne sont pas les conséquences de nos actes qui nous rendent responsables d'eux. Nous ne pouvons pas les maîtriser, au mieux en envisager quelques-unes, et encore toute action s'inscrit dans un ensemble de causes sur lesquelles nous ne pouvons pas agir. La responsabilité des conséquences est seconde par rapport à celle que nous avons par rapport à notre acte : c'est lui qui a introduit une cause d'effets dans le monde, et c'est de lui préalablement que nous avons à répondre.
[...] Bien des choses paraissent tout autres qu'elles ne sont. Le bon extérieur est la meilleure recommandation de la perfection intérieure. » Cette longue citation est une variation sur le thème de l'apparence trompeuse, et surtout elle en montre le but : nous sommes responsables du maintien de la cohésion humaine. Elle ne peut se faire que sous la forme des rapports de pouvoirs, de tromperie et de flatterie, parce que l'homme est un être de désirs, de passions, de violence et qu'elle le « police » par un jeu qui limite par ses règles codifiées. [...]
[...] La conscience doit se soumettre aux jeux de pouvoir On peut retrouver dans l'œuvre de Baltasar Gracian, jésuite espagnol du XVIIe siècle, L'homme de cour, la clé d'une telle idée de la responsabilité de nos actes : elle consiste toujours à tromper l'autre pour avoir du pouvoir. Dans l'article intitulé « Faire, et faire paraitre », il explique cette technique : « Les choses ne passent point pour ce qu'elles sont mais pour ce qu'elles paraissent être. Savoir-faire, et le savoir montrer, c'est double savoir. Ce qui ne se voit point est comme s'il n'était point. La raison perd son autorité, lorsqu'elle ne paraît pas telle. [...]
[...] Mais le problème posé ouvre une autre voie : faudrait-il être conscient, ou peut-être même inconscient, d'autre chose que d'être l'auteur de ses actes pour engager sa responsabilité ? La responsabilité est l'engagement lié à la conscience de notre devoir Comment l'idée de responsabilité de nos actes apparait-elle en général ? Il ne suffit pas de dire à quelqu'un « tu as fait cela » pour juger de cette responsabilité. Il faut qu'il « réponde » du rapport avec un devoir qu'il a établi par son acte. [...]
[...] Nous sommes des « personnages » qui portons les masques de la dignité, de la vertu et de la bonté par réalisme. La scène du monde nous contraint à agir selon ses exigences, et la conscience s'y adapte parce que c'est la réalité qui est le juge. Nous échangeons socialement et nous communiquons par des sortes de signes (masques convenus avec autrui) : nous sommes donc aussi hypocrites envers nous-mêmes qu'envers autrui. Seule compte la conscience de nos actes ; elle sait que nous avons un « rôle » à jouer et elle calcule les effets de ses actes. [...]
[...] Nous cherchons toujours des excuses pour éviter de prendre en compte notre responsabilité. Cependant, elle est apparue déterminante au cours de notre réflexion. Notre liberté est la tâche d'avoir à créer, à notre simple place, tel ou tel type de monde par les actes dont nous sommes la cause. C'est le sens de notre responsabilité : toute décision s'impose aux autres, notre conscience a donc à choisir l'avenir humain que notre acte va faire exister. Cependant, on se pose la question de savoir quelle responsabilité peut élever l'homme au-dessus de lui-même ? [...]
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