Entre 2008 et 2009, 35 suicides liés au travail ont été dénombrés à France Telecom. Ce simple fait souligne que le stress semble devenu un des éléments incontournables du monde du travail. Face à ce phénomène de société, le mot d'ordre spinoziste : "ni rire, ni pleurer, mais comprendre" prend toute sa force.
La question qui peut se poser est donc : est-il possible d'envisager de travailler sans stress ?
La notion de stress accompagne-t-elle nécessairement la notion de travail ? (...)
[...] Peut on concevoir l'activité du travail dépourvue de stress? Se demander si travailler sans stresser est possible, c'est donc se demander si le stress fait partie de la nécessité de tout travail. Spinoza dans son Traité de la réforme de l'entendement et dans son Ethique, montre que l'Homme, pour expliquer un phénomène a tendance, par facilité, à projeter son mode d'action (moyens-fins) sur les modes naturels du monde. Les humains, au lieu de réfléchir aux causes véritables des choses, préfèrent inventer et mettre en place un mythe qui rend "évident","fatal" les évènements du monde. [...]
[...] Comment expliquer et désamorcer alors le stress? Ce qui fait accepter le stress , ce sont son évidence et sa fatalité apparentes le petit employé pensera qu'il faut bien se soumettre aux injures de son patron, puisque c'est ainsi qu'une entreprise avance, est performante et peut, à la fin du mois lui reverser son salaire. C'est qu'en fait le stress s'appuie sur le mythe de la performance, rattaché au travail.On substitue à la notion de travail la notion de performance (faire toujours plus pour avoir plus) Spinoza peut alors nous aider à comprendre trois choses importantes pour comprendre la genèse du stress au travail et y faire face: -tout d'abord, le stress n'est pas une fatalité inhérente au travail mais est induit nécessairement par une méthode de management qui l'instrumentalise en s'appuyant sur le mythe justificateur de la performance; -ensuite, le véritable management n'est pas l'art de dominer en créant du stress, mais de coordonner les désirs particuliers pour aboutir à une action commune cohérente et réussie. [...]
[...] L'employé, sur sa plateforme de call-center, s'exclame que "les objectifs viennent d'en-haut". Les objectifs ne sont en fait qu'un prétexte pour maintenir une situation d'oppression, de hierarchie, de peur, de domination (car que faire contre mon chef si je n'atteins pas les objectifs?). Spinoza dénonce fortement cette méthode dans son Traité de l'autorité politique: diriger, être manager, ce n'est pas créer les conditions de soumission sur ses sujets, mais bien plutôt tenter de concilier les désirs de chacun qui sont nécessairement contraires et variés, et de fournir aux agents des motifs pour les faire agir dans le même sens. [...]
[...] On constate ainsi que les notions de travail et de stress sont nécessairement incompatibles et que le travail ne peut se concevoir s'il est accompagné de stress. Il est alors inquiétant de constater que les remèdes proposés à la crise du travail chez France Telecom n'ont été que des audits pour "réduire le stress". Car "réduire le stress", c'est encore l'admettre dans le champs du travail Pour venir à bout du stress, il ne faut donc pas seulement "changer nos conditions de travail", mais bien changer notre manière de penser le travail lui-même. [...]
[...] Spinoza et le "stress" au travail Entre 2008 et suicides liés au travail ont été dénombrés à France Telecom. Ce simple fait souligne que le stress semble devenu un des éléments incontournable du monde du travail. Face à ce phénomène de société, le mot d'ordre spinoziste: "ni rire, ni pleurer, mais comprendre" prend toute sa force. La question qui peut se poser est donc: est il possible d'envisager de travailler sans stress? La notion de stress accompagne-t-elle nécessairement la notion de travail? [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture