Commentaire de Philosophie niveau Lycée d'un extrait de la Préface du Traité des autorités théologique et politique de Spinoza.
[...] Enfin, si un spectacle insolite les frappe d'étonnement, ils croient être témoins d'un prodige manifestant la colère ou des Dieux ou de la souveraine Déité(1) ; dès lors, à leurs yeux d'hommes superstitieux ou irréligieux, ils seraient perdus s'ils ne conjuraient le destin par des sacrifices et des vœux solennels. Divinité mythique : dieu ou déesse Spinoza, Traité des autorités théologiques et politique, Préface, (1670) 1. Spinoza soutient ici l'idée que la superstition n'est pas simplement une erreur de jugement comme cela serait le cas à l'issue d'un calcul mal fait. Ce n'est pas parce que je me trompe que je deviens pour autant superstitieux. [...]
[...] La raison et la science qui en résulte, sont-elles condition suffisante pour fuir la superstition. Pour affirmer cela, il faudrait envisager la raison comme calcul froid susceptible de faire de la vie d'un homme un long fleuve encadré par les berges du savoir. Mais ceci n'exclut pas les inondations ni les périodes de sécheresse. La raison en l'homme n'abolit pas ce fond irrationnel présent en tout homme qui éprouve ainsi le désir de s'ouvrir à des pistes non banalisées par un savoir souvent proche du prêt-à-porter intellectuel. [...]
[...] L'expérience a beau ne pas confirmer l'existence de lien nécessaire entre tel événement et telle issue, les hommes n'en continuent pas moins de croire à la puissance mystérieuse de l'événement. Le second exemple met en scène ce qu'au Moyen Age on appelait la théophanie, c'est-à-dire la tendance à attribuer à Dieu ou aux dieux un ordre particulier dans la nature comme autant de présage à interpréter. L'ignorance de départ face à un événement inconnu, fait place à une croyance qui cherche à expliquer les phénomènes naturels par une cause non naturelle. [...]
[...] Cette prévision prend une double allure : prévoir, ce serait imprimer sa volonté sur les événements comme s'il suffisait de vouloir pour que les faits se plient à notre volonté ; prévoir, ce serait aussi limiter les effets du hasard comme si celui-ci devait être toujours heureux. Malheureusement cette hypothèse ne se vérifie pas dans les faits comme le dit le dicton : il n'y a pas de hasard heureux ! Les arguments de Spinoza sont présentés sous la forme d'un constat : la vie est d'une telle complexité et les événements tellement imprévisibles que rien ne se passe comme les hommes le voudraient. L'imprévisibilité engendre l'incertitude voire l'indécision ; dès lors ils sont réduits à manifester une tendance à la crédulité. [...]
[...] Il ne semble donc pas que la superstition soit le résultat nécessaire de l'ignorance même si, de fait, l'ignorance facilite ce genre de comportement. Un physicien prix Nobel peut en effet, par superstition, ne pas passer sous une échelle ou refuser de s'asseoir à une table où il y aurait treize convives. Il y a dans l'inconscient collectif des superstitions bien ancrées que la raison ne saurait chasser. [...]
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